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SYRIE

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dans les ports [de la cote. Alexandrettc, qui a reçu, en 1898, 609 navires, a importé pour 51 millions de fr. dont 29 millions d’objets manufacturés, et exporté pour 28 millions de fr. (laine, céréales, beurre, cuirs et peaux, cocons, racines de réglisse, etc.). Lorsque Alexandrette sera desservie par le chemin de fer projeté de l’Euphrate, son port sera le plus actif de toute la Syrie. — Latakié exporte pour 8 raillions defr. et importe pour 1 million 1/2. — Tripoli a reçu, en 1898 : 392 vapeurs et 1.531 voiliers. Exportations : 18 millions 1/2 de fr. (céréales, laine, soie brute, savon, fruits, etc.). Importations : 12 millions de fr. (cotonnades et objets manufacturés). La culture des orangers et citronniers aux environs de Tripoli rapporte 2 millions 1/2 de fr., et autant celle des oliviers. Beyrout a reçu, en 1898 : 723 vapeurs et 1.970 voiliers. Exportations : 45 millions de fr. (soie grège et cocons, huile d’olive, réglisse, coton, fruits, sésame, céréales, etc.) Importations : 42 millions de fr. (cotonnade, bois de construction et chauffage, café, pétrole, riz, sucre, objets manufacturés, etc.). — Saida exporte des oranges et des citrons ; son commerce est en reprise : en 1898, 218 vapeurs et 781 voiliers y ont fait escale. Tyr exporte un peu de coton, de tabac, de céréales et des meules du Haouràn, (Pour les ports plus au S., V. PALES-TINE. )

Au pied du Liban, dans la Békaa, le village de Zahléh, grand centre de culture de la vigne et des céréales, de fabrication du vin et de l’araq ou eau-de-vie de raisin, est aussi un dépôt pour les céréales et les moutons que les habitants de Zahléh vont acheter dans le Haouràn et chez les Bédouins. Damas , Homs et Hamah sont des places d’échange importantes avec les Arabes du désert. Damas transforme 1.500 kilogr. d’argent par an en bijoux qu’on exporte surtout en Egypte.

V. Histoire. — Deux caractéristiques géographiques dominent toute l’histoire de la Syrie. En premier lieu, sa constitution en étroite bande de terrain resserrée entre la Méditerranée et le désert, offrant la seule voie terrestre pour passer d’Afrique en Asie. De tout temps les troupes égyptiennes et celles des empires asiatiques y font irruption et s’y livrent de mémorables combats à Mageddo, à Qadech, à Issus, à Nizib. Le sort de la Syrie est lié à la fortune des armées étrangères. En second lieu, la nature montagneuse de cette zone habitée rend les communications si difficiles

— de bonne heure la navigation dut y suppléer — que le pays se morcelle à l’infini et que dans sa continuelle vassalité il conserve, sous une légion de principicules, une autonomie proportionnée à l’éloignement et à la faiblesse du pouvoir central. Ces petits Etats sont en lutte perpé- (uelle, et chaque tribu ou famille rivale fait appel à l’étranger. Jamais le pays ne trouve un centre qui permette à ses éléments de s’unir, jamais les divers groupes ethniques ne fusionnent.

Les plus anciens habitants de la Syrie ne nous ont légué qu’un matériel d’outils de pierre dont l’étude n’a pas encore été poussée à fond (haches type de Saint- Acheul et pointes du Moustier). Dès le xvi e siècle avant notre ère, nous connaissons l’existence en Syrie de plusieurs peuples et de plusieurs langues : jusque vers la limite actuelle de la langue arabe (d’Antioche à Alep), nous trouvons des appellations sémitiques ; au delà, les termes géographiques paraissent se rattacher aux idiomes de l’Asie Mineure. Aussi loin que nous puissions remonter, c.-à-d. vers le premier empire babylonien, la Syrie, subit l’influence de ce dernier. Elle fut soumise à des (lux et reflux de populations dont le souvenir est parvenu aux historiens grecs et latins sous une forme légendaire. Ainsi les Phéniciens auraient émigré des bords du golfe Persique. A une haute époque, la Syrie méridionale et la cote étaient occupées par des populations qu’on peut grouper sous l’appellation de Chananéens, tandis que la plaine de Damas, la vallée de l’Oronte et le Naharaina (plaine d’Uep) étaient peuplés d’Araméens. Au delà habitaient des populations asiatiques dont la plus importante pour l’histoire de la Syrie fut celle des Khatti ou Hittites. Les routes que pouvait suivre une armée venant du S. étaient : 1° en passant le Jourdain près de Beisàn et se dirigeant par la plaine du llaurân sur Damas ; 2° de la plaine de Megiddo (Ibn el-Amir) gagnant Damas par Banias : de Damas on pouvait atteindre Homs, soit par la vallée du Barada et Baalbeck, soit par Yabroùd ; 3° de la plaine de Megiddo suivant la côte par Tyr, Sidon, Beyrout — stèles commémoratives du Xahr el-Kelb — Tripoli d’où l’on continuait soit sur Arad, soit sur Homs, Hamah, Alep et l’Euphrate que l’on pouvait franchir aux gués de Carchemis et de Thapsaque. Les routes accoutumées des armées devenaient en temps de paix des routes de caravanes sur lesquelles s’échelonnaient d’importantes places de commerce : les religions et l’art se diffusaient par les mêmes voies. La mer doublait les routes souvent pénibles et peu sûres (V. Piiénicie). Avec les annales égyptiennes et assyro-babyloniennes, les peintures des monuments égyptiens sont une mine inestimable de renseignements. On y voit le costume syrien régi par la mode chaldéenne (fig. 1). Les mœurs syriennes étaient si bien réglées sur celles de Fig. 1. — Syriens sous la dynastie égyptienne. Gravure extraite de l’Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, de G. Maspero.

Mésopotamie que les princes syriens, même sous la domination égyptienne, continuaient à s’entourer de scribes maniant l’écriture cunéiforme : les chancelleries syriennes correspondaient en assyrien avec le suzerain égyptien, tout en essayant de se plier aux règles du protocole des bords du Nil. La découverte des tablettes de Tell el-Amarna (Egypte) a jeté sur ces rapports la plus vive lumière. La religion syrienne était aussi modelée sur celle de Lhaldee. Les dieux locaux étaient en général désignés par les termes de Baal (maître) ou Melek (roi) suivis du nom de lieu. Les noms spécifiques étaient ceux de Chamach, le soleil, de Rachouf, représentant l’éclair et la foudre, de Dagon, etc. Aux dieux correspondaient des déesses proclamées Baalat (maîtresse) ou Milkat (reine) ou portant le terme générique d’Astarté, ou les noms spécifiques d’Anat, de Qodchou, etc. Les cultes agraires locaux se mêlaient aux cultes planétaires tels que la Chaldée les avait définis, et si les Syriens n’élevaient pas les hautes tours, les ziggourât chaldéennes, c’est que la nature leur offrait à souhait de hautes montagnes et des pics imposants comme demeures de leurs dieux.

Toutmès I er (XVIII dynastie) inaugure la série des conquêtes égyptiennes en Syrie et dresse aux bords de l’Euphrate une stèle qui fixait la limite de son empire : Gaza, Mageddo, Qadech, Carcheinis avaient été ses principales étapes. Toutmès II remporte une victoire mémorable à Mageddo. II revient à plusieurs reprises en Syrie, poussant jusqu’au Naharaina , dévastant la côte et châtiant l’orgueilleuse Qadech sur l’Oronte. Ses successeurs n’eurent pas de peiue à maintenir leur autorité eu Syrie, Les tablettes de Tell el-Amarna nous donnent un tableau très précis de la situation politique au temps d’Amenothès III et Amenothès IV. Les formules d’obéissance et de soumission sont d’autant plus humbles que les lettres