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SCANDINAVIE

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le triomphe définitif de lu dynastie anticléricale commence une seconde période de prospérité qui dura quatre-vingts ans. Haakon, qui fut en relations avec Louis IX de France, soumit l’Islande et le Groenland ; il mourut aux Orcades (-1263). Son fils, Magnus le Réformateur (Lagabœter), s’occupa surtout de législation. La mort de ce prince (1280) permit à l’Eglise norvégienne, pendant une minorité et une régence, de reprendre l’offensive. La lignée masculine de Harald Haarfagr s’éteignit avec HaakonV,en 1319 ; et la décadence de l’Etat norvégien, désormais placé, au hasard des alliances de famille, dans la dépendance de ses voisins, commença. Trondhjem, capitale de la Norvège florissante du xiu e siècle, qui s’étendait de la Biarmie jusqu’à la Scanie danoise, fut, pendant cette période, la plus grande ville du Nord.

Les Folkungar. — Les Folkungar étaient une famille puissante et turbulente de l’Ostrogothie, dont les chefs avaient joué le rôle de maires du palais et de faiseurs de rois sous les derniers princes fainéants de la dynastie suédoise de Sveker. Le comte Birger Brosa (Birger jarl), des Folkungar, avait régné en Suède sous le nom d’Erik Eriksson. Après 1250, il gouverna comme tuteur de son propre fils Valdemar. Puis les querelles de succession entre frères de sang royal, qui avaient déjà paralysé la Suède pendant les siècles précédents, recommencèrent entre ses descendants. Les principales figures de la dynastie des Folkungar sont, avec Birger Jarl, Magnus Ladulâs (Serrure-de Grenier, à cause de la sécurité qu’il procura aux campagnes) et le régent Torgils Knutsson, qui achevèrent la conversion au christianisme et la conquête de la Finlande, et soutinrent contre les Karéliens et les Russes de Novgorod des guerres médiocrement heureuses. En 1328, Magnus, fils d’Erik, déjà héritier, par sa mère, de la couronne de Norvège, fut appelé au trône de Suède. Roi de Suède et de Norvège, Magnus Smek (le Débonnaire ) enleva, par surcroit, aux Danois affaiblis les provinces qu’ils possédaient dans la péninsule Scandinave. Mais l’union ne dura qu’un moment. Magnus le Débonnaire vécut assez longtemps pour en voir la dissolution. Après de longues guerres civiles, un de ses fils, Haakon, resta en possession de la Norvège, tandis que les seigneurs (stormânnen, hommes puissants) suédois allaient chercher en Allemagne un Allemand, (ils d’une princesse suédoise, Albert de Mecklemhourg (1363-89), dans l’espoir, qui ne fut pas trompé, d’être les maitres sous son autorité nominale. « Le règne d’Albert est l’époque de la faiblesse la plus profonde du pouvoir royal en Suède, et de la puissance la plus grande de l’aristocratie. » L’époque des Folkungar fut marquée, en Norvège, par un affaiblissement sensible : au xiv e siècle, les Allemands de la Ligue hanséatique ont été les maitres absolus du commerce dans ce pays et n’ont pas laissé d’y avoir, en outre, une influence politique ; la population diminua d’un tiers pendant la Grande Peste ; la plupart des familles nobles s’éteignirent. En Suède, au contraire, quoique l’exploitation commerciale et industrielle (mines) du pays fut aussi monopolisée par les Allemands de la Hanse, et quoique la « grande mort » ait fait aussi des ravages épouvantables, le siècle des Folkungar est celui où s’organisèrent les ordres de la nation (stand) : l’Eglise, qui formait un Etat dans l’Etat ; la noblesse, avec ses diètes (lier redagar) qui ont accaparé l’ancien droit de vote populaire, toute-puissante à lu cour des rois (rikets ràd), et dont la position fut encore consolidée, sous Magnus Ladulâs, par l’introduction de certaines institutions féodales, grossièrement imitées de celles du continent. A la fin du xm e siècle, les Suédois affluaient à l’Université de Paris ; des artistes et des artisans français ont été appelés alors en Suède ; sainte Brigitte (V. ce nom) eut une célébrité européenne.

L’Union de Calmar. — En 1363, Marguerite de Danemark épousa le roi de Norvège Haakon. Après la mort de Haakon (1387), Marguerite, reine en Norvège, régente en Danemark, fut appelée par les Suédois hostiles à Albert de Mecklemhourg ; Albert lut battu à Falkoping le 24 fév. 1389, et, quelques années après, Marguerite parut maitresse de la Suède. L’Union (dite de Calmar) fut enfin établie en 1397, lorsque le petit-neveu de Marguerite, Erik de Poméranie, roi héréditaire de Norvège, fut élu roi de Danemark et de Suède, suivant les formes usitées dans ces pays. Elle devait être « perpétuelle » ; mais les conditions en étaient mal définies, et les circonstances en rendaient presque impossible la réalisation ; il y avait, en effet, des haines inexpiables entre les trois branches de la famille Scandinave ; des jalousies étaient inévitables ; de plus, en Danemark comme en Suède, la royauté était très faible, tandis que l’aristocratie, très forte, était animée de l’esprit le plus particulariste ; seul, en Suède comme en Danemark, le clergé fut ordinairement pour l’Union.

Elle était si peu solide, cette Union, que le premier roi des trois royaumes unis. Erik de Poméranie, fut successivement déposé dans tous les trois. Son second successeur, Christian d’Oldenbourg, ne put jamais s’imposer à la Suède. La petite noblesse et les paysans de Suède formèrent au xv c siècle un parti national contre la domination des rois de l’Union, considérés comme Danois (ils étaient, en réalité. Allemands), et abhorrés à ce titre. Ce parti eut, naturellement, ses héros, qui sont restés légendaires ; le magnanime Engelbrecht, leader des paysans de Dalécarlie en 1434, assassiné par un traitre en 1436 : SteaSture l’ainé, le vainqueur de Brunkeberg en 1471 ; le malheureux Sten Sture le Jeune, vaincu par Christian II de Danemark, et sa femme Christina Gyllenstierna. En général, la Suède n’opposa pas de « roi suédois » aux rois de l’Union ; mais tandis que l’Eglise suédoise et une partie de la haute noblesse travaillaient à faire accepterceux ci sans réserve, le parti national ne les toléra nominalement qu’à la condition que le gouvernement de la Suède fût remis en réalité à des gens du pays, « administrateurs du royaume » (Riksforestàndare). Des Sture (V. ce nom) ont été, le plus souvent, choisis comme « administrateurs du royaume » par le parti national, au cours du xv e siècle. Les Sture ont été, en quelque sorte, au xv e siècle, les « rois non couronnés » des paysans et des hobereaux de Suède. Ils commencèrent à émanciper la contrée de la lourde suprématie commerciale de la Hanse. La Renaissance de la Suède. — L’atrocité des exécucutions qui suivirent la victoire de Christian II de Danemark sur Sten Sture le Jeune, après la bataille du lac Asunda (20 janv. 1320), fut la cause de la rupture de l’Union, qui avait toujours été si précaire, de Calmar. Le 15 avr. 1523, Christian II, effrayé par la révolte des mineurs de la Dalécarlie, conduits par Gustave Eriksson Vasa, s’enfuit de Suède pour toujours.

Gustave Vasa (V. Gustave I er , t. XIX, p. 016), le premier roi national de la Suède, « arracha son pays à la sujétion politique du Danemark, à la dépendance économique de l’Allemagne et au joug ecclésiastique des papes ». La Suède se reposa, sous son règne, d’un état de guerre qui avait été presque permanent pendant des siècles. Le clergé, qui passait pour posséder les deux tiers du sol du royaume, fut dépouillé ; ses chefs, l’archevêque d’Upsal et l’èvèque du Vesteràs, furent punis, parla mort, de leur fidélité aux souvenirs de l’Union. La victoire définitive de la réforme sur le catholicisme en Suède date du synode d’Upsal en 1593. Gustave Vasa avait eu le tort de régler le droit de succession à la couronne de manière qu’il ne pouvait manquer de se produire, entre ses héritiers, des conflits du genre de ceux qui avaient désolé toute la Scandinavie du moyen âge. C’est Charles IX (y 1611), le second fondateur de la dynastie des Vasa, qui guérit les nouvelles plaies, résultat de cette imprévoyance. C’est sous Gustave-Adolphe, fils de Charles IX, que l’indivisibilité de l’Etat fut proclamée et que le royaume cessa d’être partagé entre les princes du sang.