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ARISTOPHANE — ARISTOTE
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né vers 260 av. J.-C. Dans un âge déjà avancé, il succéda à Apollonius de Rhodes comme préposé à la bibliothèque d’Alexandrie ; il aurait rempli cette charge jusqu’à la fin de sa vie, si une tentative de quitter Alexandrie pour la cour de Pergame ne l’avait fait tomber en disgrâce et jeter en prison. Il mourut en 484, sous Ptolémée Epiphane. Aristophane fut le véritable fondateur des études grammaticales et de la critique des textes, d’après une méthode sure et des principes rigoureux. Son œuvre était considérable : la critique d’Homère en formait la partie la plus éminente, celle du moins dont les résultats sont surtout arrivés jusqu’à nous. Il prit pour base de son travail la récension de Zénodote ; aux signes en usage chez ce dernier, c.-à-d. à l’obel et à la diplé, il ajouta le ceraunion, sorte d’accolade qui indiquait l’atéthèse de plusieurs vers consécutifs, le sigma et l’antisigma et enfin l’astérisque, qui désignait les vers dont il lui semblait impossible d’établir le sens (V. Aristarque). D’accord avec Zénodote sur un grand nombre de passages réputés apocryphes, il en rétablit quelques-uns, mais en retrancha d’autres, quelquefois sans motif suffisant, le plus souvent par des considérations grammaticales et linguistiques, plus rarement en vertu de raisons subjectives. Il introduisit dans son édition l’emploi des signes prosodiques ; quelques-uns lui en attribuent même l’invention. Il s’occupa également du commentaire ; il n’est pas douteux qu’un grand nombre de remarques qui se rencontrent sans nom d’auteur dans les scholies, et qui ont été recueillies par Eustathe, sont son ouvrage. Il ne se borna pas à la critique d’Homère, mais étendit ses recherches, avec un soin proverbial (Varron emploie l’expression de lampe d’Aristophane : lucerna Aristophanis), sur un très grand nombre de poètes. Hésiode, Alcée, Anacréon, Pindare, Sophocle, Euripide, Aristophane et Ménandre, lui sont redevables et pour la constitution du texte, et pour le commentaire littéraire historique et grammatical. Un certain nombre d’arguments en prose et de didascalies figurant en tête des tragiques et des comiques grecs doivent aussi lui être attribués. Son ouvrage le plus étendu, formé de monographies séparées, mais désigné dans son ensemble par le terme général de Lexique, traitait de la signification des mots, expliquait les formes rares, déterminait les synonymes. C’était un trésor d’une valeur considérable, que les grammairiens des âges suivants ont mis largement à contribution. Aussi est-il difficile aujourd’hui de restituer à Aristophane ce qui lui a été dérobé et les fragments authentiques de son œuvre, vraiment colossale, sont assez rares.

J.-A. Hild

Bibl. : A. NAUCK, Aristophanis Byzantine grammatici Alexandrini fragmenta ; Halle, 1848. — VILLOISON, Prolegom. ad Homerum, pp. 23 et suiv. — WOLF, Prolegom. in Homer. pp. 216 et suiv.— A. PIERRON, Iliade d’Homère, Introd., pp. 34 et suiv.

ARISTOPHANIEN (Vers) (Métr.). Nom donné par les anciens grammairiens au vers tétramètre anapestique (V. ces mots). Aristophane en a fait un assez grand usage dans ses comédies ; d’après Héphestion (ch. VIII), le comique sicilien Epicharme avait composé deux pièces entières sur ce mètre. On donne aussi quelquefois ce nom au tétramètre iambique catalectique, et surtout au vers logaédique formé d’un dactyle et de deux trochées, Lydia (—ˇˇ) dic(—) per (ˇ) omnes (—ˇ), appelé aussi Archiloquien.

A. W.

ARISTOPHON, du bourg d’Azénie, célèbre homme d’État et orateur athénien, né vers 438 av. J.-C., mort vers 338. Il prit une part active aux réformes qui signalèrent l’archontat d’Euclide (403 av. J.-C.). Démocrate ardent, sa violence lui attira de nombreux procès : il se vantait lui-même, à la fin de sa vie, d’avoir été soixante-quinze fois poursuivi pour mesures illégales proposées dans l’assemblée du peuple, sans jamais avoir été condamné. Démosthène fait, à plusieurs reprises, de son éloquence un grand éloge. Il ne nous reste pas un seul fragment de lui.

P. G.

Bibl. : P. GIRARD, Aristophon d’Azénia, dans l’Annuaire de l’Association pour l’encouragement des études grecques en France, 1883.

ARISTOPHON, peintre grec, frère du célèbre peintre Polygnote de Thasos. Sa réputation n’approcha jamais de celle de son frère. On n’a sur ses œuvres que d’assez vagues renseignements. Il semble s’être particulièrement inspiré du cycle troyen.

ARISTOPHON, poète grec appartenant à la catégorie des poètes de la Comédie Moyenne. Il ne reste de lui que quelques fragments, publiés par Meineke, dans le t. III, de ses Fragmenta comicorum græcorum.

ARISTOPHYCUS. Ce nom a été donné par Massalongo à des empreintes de végétaux fossiles qui rappellent, par leur forme générale, les frondes de certaines Algues Siphonées du genre Caulerpa. L’Aristophicus Agardhianus Massal appartient à la flore éocène de Monte-Bolca (Italie).

L. C.

ARISTOTE (Άριστοτέληζ). S’il est vrai qu’en certains hommes s’incarne parfois tout le génie d’un peuple, et que ces vastes et puissants esprits soient comme l’acte et la perfection où tout un monde de virtualités trouve son terme et son achèvement, Aristote, plus que personne, a été un tel homme en lui le génie philosophique de la Grèce a trouvé son expression universelle et parfaite. C’est donc plus que la pensée d’un individu, d’ailleurs considérable, c’est l’esprit de la Grèce elle-même, parvenue à l’apogée de sa grandeur intellectuelle, que nous évoquons en ce moment. Il sera conforme à l’esprit analytique du philosophe dont nous nous occupons, et il est pratiquement indispensable d’établir de nombreuses divisions dans un sujet si vaste, et d’en considérer une à une toutes les parties.

I. Biographie. Les auteurs anciens qui traitent de la vie d’Aristote sont les suivants : 1o Diogène Laërce, V, 1-35 ; 2o Denys d’Halicarnasse, lettre à Ammaeus, i,.B’ 3o l’auteur anonyme d’une biographie d’Aristote publiée par Ménage dans le second volume de son édition de Diogène Laërce, biographie composée peut-être d’après Hésychius 4o le Pseudo-Ammonius 5o le Pseudo-Hésychius 6o Suidas, à l’article Άριστοτέληζ. Ces textes se trouvent à peu près tous dans le tome 1 de l’édition des œuvres d’Aristote entreprise par Buhle de 1791 à 1800. La valeur de ces différentes sources ne peut être déterminée a priori. Tout ce qu’on peut faire, c’est d’examiner une à une chaque indication au point de vue de sa vraisemblance interne et externe. Aristote naquit à Stagire, colonie grecque ionienne de la Thrace, située au bord de la mer dans la presqu’île de Chalcidique, en l’an 384 avant J. —C., et mourut"à Chalcis, en Eubée, en 322. Son père, Nicomaque, était médecin, ainsi que ses ancêtres. Ils rattachaient leur famille à Machaon, fils d’Esculape ; et, avec beaucoup d’autres, ils s’appelaient Asclépiades. Nicomaque fut médecin du roi de Macédoine, Amyntas II, le père de Philippe. Cette circonstance a pu contribuer à faire appeler Aristote à la cour du roi de Macédoine pour l’éducation d’Alexandre. Il est vraisemblable qu’en sa qualité d’Asclépiade, Aristote fût de bonne heure instruit dans l’anatomie. Vers l’âge de dix-sept ans, il perdit ses parents. Il se trouva alors indépendant et en possession d’une grande fortune. L’éclat d’Athènes [’attira dans cette ville. Il y vint en 367 ou 366 avant J.-C., dans sa dix-huitième année. Platon, qui y avait fondé son école vers 387 ou 386, en était alors absent. Il était parti pour Syracuse en 368 ou 367. Il devait y retourner en 361 ou 360. Aristote entra dans le cercle des élèves de Platon, et il appartint à cette école pendant vingt ans, jusqu’à la mort du maître. Par là, déjà, se trouve réfutée la fable d’une brouille qui serait survenue, bien avant la mort de Platon, entre le maître et le disciple, et qui aurait été causée par l’ingratitude et le manque d’égards de ce dernier On dit que Platon, ayant remarqué le zèle et la vivacité d’esprit d’Aristote, l’appelait « le liseur » et « l’intelligence de l’école ». Il est vraisemblable qu’à Athènes même il étudia, non seulement le platonisme, mais les autres systèmes