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PRÉFACE


faits en Allemagne, en Angleterre et aux États-Unis. L’Italie et la Hongrie ont eu également leurs encyclopédies. En France, le DICTIONNAIRE DE LA CONVERSATION, l’ENCYCLOPÉDIE MODERNE, de Léon Renier, le GRAND DICTIONNAIRE UNIVERSEL DU XIXe SIÈCLE, de Larousse, sont, entre bien d’autres, les tentatives les plus honorables. Mais ce ne sera blesser aucun de nos devanciers que de dire que nul d’entre eux n’a eu l’influence et n’a joué le rôle de l’Encyclopédie de Diderot et de d’Alembert.

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D’Alembert, écrivant le Discours préliminaire qui devait servir de préface à l’Encyclopédie du XVIIIe siècle, faisait ressortir la différence qui existe entre une encyclopédie et un dictionnaire.

Tandis que les dictionnaires généraux ou spéciaux n’ont d’autre objet que de mettre à la portée d’un nombre toujours croissant de lecteurs une quantité toujours plus considérable de documents et de renseignements, une encyclopédie doit se proposer un but plus élevé.

Montrer le lien entre ces différents éléments, rattacher les unes aux autres par leurs affinités naturelles les diverses connaissances humaines ; — les cataloguer, les diviser en groupes, en genres, en familles, en espèces ; — telle est la première tâche qui s’impose à ceux qui veulent édifier une encyclopédie.

Il faut ainsi condenser non seulement les faits, mais les idées.

Il faut, marchant du concret à l’abstrait, rassemblant les traits communs aux faits particuliers, en dégager les généralités. Puis, rapprochant les unes des autres les généralités différentes, saisir soi-même et faire saisir à autrui leurs traits communs.

Ces faisceaux de faits et d’idées une fois constitués, on les compare entre eux et c’est alors que se pose le problème de la classification des faits particuliers et de la classification de ces faits plus généraux qu’on appelle les lois naturelles.

La classification des faits particuliers ne soulève pour l’encyclopédiste aucune difficulté spéciale.

Il y a longtemps que les divers ordres de connaissances se sont constitués de façon à ramener dans le domaine de sciences délimitées, bien que pouvant avoir entre elles des points de contact nombreux et des frontières quelquefois indécises, tous les faits sur lesquels se sont exercées l’expérience et la raison humaine.

Les problèmes de classification que soulèvent tels ou tels faits particuliers sont du domaine des sciences dans lesquelles on peut les faire rentrer.

Ce n’est pas par le fait de construire une encyclopédie qu’on pose ces problèmes ; ils existaient avant, ils pourront subsister longtemps après. L’encyclopédiste doit en constater l’existence ; ce n’est pas à lui qu’il appartient de les résoudre.

La tâche commence pour lui lorsque, ayant rassemblé tous ces faits particuliers, matière première de l’œuvre encyclopédique, il s’agit de la coordonner en un ensemble bien proportionné.

Cette coordination n’est que la classification des faits généraux, et la classification des faits généraux c’est la classification des sciences.

Tel est le problème qui résulte pour l’encyclopédiste de la nature même de la tâche qu’il s’est donnée.