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RICHARD WAGNER EN CARICATURES.

Il a le front beau, noble, élevé ; le bas du visage, écrasé et vulgaire. On dirait que deux fées, l’une irritée, l’autre affectueuse et bonne, ont présidé à sa naissance. La fée de l’harmonie a caressé et embelli le front d’où devaient sortir tant de conceptions hardies, et de pensées fortes ; la fée de la mélodie prévoyant le mal que lui ferait cet enfant, s’est assise sur sa figure et lui a aplati le nez.


Au tour de M. Drumont qui, en 1869, écrivait, lui aussi, sa brochure sur l’homme et le musicien à propos de Rienzi, représenté, on s’en souvient, avec un certain luxe, au Théâtre Lyrique.


Il suffit de regarder Wagner pour deviner une individualité exceptionnelle. Le front est large et magnifiquement développé, le regard est fin et pénétrant, la bouche est sarcastique ; — l’ensemble exprime un mélange de finesse et de bonté.


Sautons quelques années et demandons à M. Victor Tissot, qui a vu Wagner en 1865 puis en 1875, ses impressions personnelles.

En 1865, à Munich, il nous le représente comme une espèce de diablotin tout noir, à la longue chevelure flottant sur les épaules, et dont les jambes, minces comme des flûtes, se perdaient dans d’énormes chaussons de feutre, puis il ajoute :


On était à la veille de représenter Tristan et Iseult, et le maestro, en proie à la fièvre, tout plein de feu, ne pouvait tenir en place ; il sautait et se trémoussait ; il agitait à tort et à travers ses bras d’araignée turbulente. Les paroles sortaient de sa houche en flots désordonnés. On eût dit d’un torrent subitement grossi par les pluies.

Tel était Wagner en 1865, à Munich ; tel on le retrouve aujourd’hui, à Bayreuth, à dix ans de distance.

Il n’y a que les cheveux qui ont changé de couleur. Ils sont