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RICHARD WAGNER EN CARICATURES.


IV
Louis II, roi de Bavière


Ce n’est point le roi barbu qui s’avance, mais bien le moderne chevalier Lohengrin avec sa harpe et ses cygnes d’or. Sur les eaux du plus romantique des lacs son équipage aquatique trace de profonds sillages et les filles du Rhin pour lui ajoutent de nouveaux couplets à leurs chants bayreuthiens.

« Première Fée. — Une voix connue me parvient à l’oreille, chose incroyable en ce siècle qui a perdu tout romantisme.

« Les Fées. — Flots, apaisez-vous ; heureux pays, réjouis-toi. Bienheureux ressuscite le prince charmant de la tradition, envoyé du Saint-Graal.

« Richard Wagner. — Je reste muet de saisissement et de surprise ! Par grâce, mon bienfaiteur, dites, sous quelle forme apparaissez-vous ici ? Il me semble que vous aimez et que vous vivez, que vous régnez et que vous mourez dans un rêve de félicité, au milieu de mon monde d’opéra. Avec un doux son magique cela évoque Téternelle mélodie de l’avenir. »

Ce fut une figure vraiment sympathique que ce souverain mélomane[1], ce « fiancé de la musique », qui rêvait une Allemagne poétique là où d’autres réalisèrent une Allemagne militaire et pratique, le souverain aux lacs profonds, aux châteaux mystérieux, en un mot, le souverain pour lequel Wagner semble avoir été créé tout exprès.

Représenté presque toujours sous des traits sympathiques, il

  1. Louis II, qui fut plus ou moins misanthrope, qui, les dernières années, ne voulait plus avoir ds rapports directs avec les humains, qui ne parlait plus à ses ministres qu’en leur tournant le dos, fit souvent exécuter « pour lui seul » des opéras ou des parties d’opéras de son compositeur préféré. Les archives du théâtre de Munich renferment, entre autres, l’annonce d’une « représentation spéciale de Lohengrin, donnée le 21 avril 1882, devant S. M. Louis II (aus besonderen Wünsch des Monarchen) » avec l’annotation suivante : « Sur invitation de S. M., Richard Wagner et sa femme ont assisté à cette représentation. »