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RICHARD WAGNER EN CARICATURES.

un des habitués de son salon ; et comme, lui aussi, il avait également préconisé le retour du drame lyrique à la conception de Glück, on vit toujours quelque peu en lui un disciple de l’auteur du Tannhäuser.

Mais loin de prendre fait et cause pour le musicien novateur, Berlioz le malmena assez vivement dans ses articles et dans sa correspondance, protestant bien haut contre la façon dont on l’enrôlait parmi les apôtres de la musique de l’avenir[1]. C’est que Berlioz auteur des Troyens, qui, alors cherchaient à se faire ouvrir les portes de l’Académie Impériale de Musique, ne pouvait se montrer impartial à l’égard de celui qui, bientôt, allait devenir son plus redoutable concurrent.

On peut même juger, par ces quelques passages empruntés à sa correspondance, du degré de mauvaise humeur et d’animosité auquel il se laissa aller, lorsque le Tannhäuser, grâce à de hautes protections, passa à l’Opéra :


14 février 1861 : « L’opinion publique s’indigne de plus en plus de me voir laissé en dehors de l’Opéra, quand la protection de l’ambassadrice d’Autriche y a fait entrer si aisément Wagner. »

21 février 1861 : « Wagner fait tourner en chèvres les chanteuses, les chanteurs, et l’orchestre, et le chœur de l’Opéra. On ne peut pas sortir de cette musique de Tannhäuser. Liszt va arriver pour soutenir l’école du charivari. »

  1. Berlioz se défendait d’être un des préconisateurs de la musique de l’avenir, mais il est assez piquant d’observer que, lorsqu’il entreprit son voyage musical en Allemagne, les journaux spéciaux de Leipzig, de Berlin, de Vienne, furent tous d’accord pour écrire ceci ou à peu près : « Que M. Berlioz se procure un orchestre à lui et, alors, il pourra diriger comme bon lui semblera et conduire sa « nouvelle musique » ou « musique de l’avenir » comme il lui plaira de l’appeler. »