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LES PORTRAITS-CHARGE DE WAGNER.

FROU-FROU WAGNER

Ce nom appartient bien à celui qui, en une des lettres citées, a dit aimer sentir sur lui le froufrou des étoffes ; car les missives à la fräulein Bertha ne sont point l’œuvre d’un feuilletonniste, d’un romancier ; elles existent véritablement. Seize ont été publiées par la Neue Freie Presse ; quarante-deux, encore inédites, se trouvent en possession de M. Œsterlein, directeur du Musée Wagner à Vienne.

L’excentricité maladive du compositeur est donc un fait acquis.

Au xviiie siècle, le costume arménien dont Jean-Jacques donne lui-même la description et dont la raison d’être se trouve dans la maladie même du philosophe ; au xixe siècle, les costumes et les ameublements singuliers de Richard Wagner, qui s’expliquent moins facilement.

À vrai dire, il ne sera point le seul excentrique de notre époque, un écrivain de race, Barbey d’Aurevilly, ayant quelque peu brillé dans ce genre auquel le sieur Péladan doit le plus clair de sa réputation. Qui ne se souvient, également, des cravates, des gilets, des pantalons, de toute la « breloquaillerie » par lesquels le nommé Timothée Trimm arrivait à attirer sur lui l’attention de ses contemporains complaisants.

Besoin d’originalité personnelle et extérieure, particulier à certaines classes d’individus, qui se comprend chez les charlatans, chez les êtres inférieurs exerçant des professions plus ou moins avouables, même encore chez les artistes habitués au clinquant de la scène, mais qu’on a quelque peine à admettre chez des esprits supérieurs.

Chez ces derniers, évidemment, c’est comme une révolte contre l’uniformité, contre la monochromie du costume et des habitations modernes, soit qu’ils rêvent encore — singulier atavisme — dentelles, galons, broderies, soit que leurs capacités intellectuelles ne puissent se développer que dans certaines conditions de luxe et de richesse, comme d’autres ont besoin, pour produire, des douces vapeurs de l’ivresse.