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que celle des voyelles nasales ; elles donnent une impression de douceur, de mollesse, de langueur :

Cette heure a pour nos sens des impressions douces
CoMMe des pas Muets qui Marchent sur des Mousses.

(Lamartine)

Reposait MolleMent Nue et surNaturelle.

(Hugo, Le Satyre)

La liquide l exprime la liquidité et le glissement :

Le fLeuve en s’écouLant nous Laisse dans ses vases.

(Lamartine)

L’r exprime un grincement lorsqu’elle s’appuie sur des voyelles claires, et un grondement lorsqu’elle s’appuie sur des voyelles sombres :

Mais la légèRe meuRtRissuRe
MoRdant le cRistal chaque jouR.

(Sully Prudhomme, Le Vase brisé)

 … d’éclaiRs et de tonneRRes
Déjà gRondant dans l’ombRe à l’heuRe où nous paRlons.

(Hugo, Les Burgraves)

Et le peuple en RumeuR gRonde autour du pRétoiRe.

(Leconte de Lisle, La Passion)

Dans ces exemples les r sombres prêtent leur qualité expressive aux r claires, et inversement, lorsqu’elles sont en majorité ou figurent dans les mots les plus importants.

Les spirantes, comme leur nom l’indique, sont toutes propres à exprimer un souffle. Les spirantes labio-dentales f et v expriment un souffle mou et peu bruyant :

Sur le groupe endormi de ces chercheurs d’empires
Flottait, crêpe ViVant, le Vol mou des Vampires.

(Heredia, Les Conquérants de l’Or)