Page:Grammont - Petit traité de versification française, 1908.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais il y pENd tOUjOUrs quelquE gOUttE dE sANg.

(Musset, Nuit de mai)

Quelle est l’OMbrE qui rENd plus sOMbre ENcOr mON ANtre ?

(Heredia, Sphinx)

Et quANd lA tOMbe UN jOUr, cette EMbûchE prOfONde
Qui s’OUvrE tOUt À cOUp sOUs les chOsEs du mONde…

(Hugo, Chants du Crépuscule)

Crois-tu dONc quE jE sOIs cOmmE lE vENt d’AUtOmne,
Qui se nourrit dE plEUrs jusquE sur UN tOMbEAU,
Et pour qui lA dOUlEUr n’est qu’une gOUttE d’EAU ?

(Musset, Nuit de mai)

Les voyelles nasales. — On a vu les voyelles nasales, mêlées aux voyelles orales, claires, éclatantes, sombres, jouer le même rôle que les voyelles orales du même ordre qu’elles et seconder avec une note moins nette l’impression qu’elles produisent. Lorsque les nasales sont plus nombreuses que les orales, le voilement du son par la nasalité devient la qualité dominante et le timbre passe au second plan ; si bien que l’ensemble devient propre à exprimer la lenteur, la langueur, l’indolence, la mollesse, la nonchalance :

Le chemIN étANt lONg et partANt ENnuyeux.

(La Fontaine, Fables)

Et du fond des boudoirs les belles INdolENtes,
BalANçANt mollemENt leurs tailles nONchalANtes,
Sous les vieux marronniers commencent à venir.

(Musset, À la mi-carême)

À l’heure où dANs les chAMps l’OMbre des mONts s’allONge.

(Hugo, Aristophane)

Ils prennent EN sONgEANt les nobles attitudes
Des grANds sphINx allONgés au fONd des solitudes,
Qui sEMblent s’ENdormir dANs UN rêve sANs fIN.

(Baudelaire, Les Chats)