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CHAPITRE PREMIER

LES ACTES RÉDIGÉS À L’OCCASION DE LA PERSÉCUTION
DE DÈCE EN L’AN 250

Après la persécution de Sévère, l’Église chrétienne jouit de la paix durant cinquante ans environ. L’empereur Sévère Alexandre, qui mourut si jeune encore, avait été un homme des plus paisibles et des plus tolérants et il semble que les mêmes circonstances favorables pour les chrétiens subsistèrent sous Philippe l’Arabe. Mais tout changea à l’avènement de l’empereur Dèce. Celui-ci, voyant la décadence générale de l’empire, conçut le projet d’un renouvellement de la vieille constitution de l’État, y compris aussi la rénovation de l’ancienne religion romaine et de la foi païenne. Son caractère de soldat le poussait à combattre énergiquement le grand ennemi de son entreprise : le christianisme. Un édit spécial, qui devait être publié partout, ordonna de sacrifier aux dieux en présence de toute la population, hommes, femmes, esclaves, enfants, et même enfants à la mamelle. Dans toutes les villes et dans tous les villages des commissions spéciales surveillaient l’exécution exacte de l’édit. On exigea le sacrifice, les libations, l’encensement des autels et l’usage de la viande des victimes.

Les effets de cet édit furent effrayants. « Partout, dit Grégoire de Nysse, on traînait les chrétiens, hommes, femmes et enfants ; on les traînait à la ville, les prisons étaient pleines de ceux dont le seul crime fut leur piété, on maltraita les croyants de toute manière à dessein et de propos délibéré. »

Il s’en trouva de faibles. En présence des persécuteurs, ils tâchaient de diverses manières d’échapper aux tourments. Quelques-uns encensaient les autels, ce sont ceux que les fidèles nommaient thurificati, d’autres sacrifiaient (sacrificati), une troisième classe, moins coupable, fut appelée libellatici, c’est d’eux qu’il s’agit dans la 30e (31e) lettre de la correspondance de saint Cyprien[1] : … sententiam nostram dilucida expositione protulimus aduersus eos qui se ipsos infideles inlicita nefarionun libellorum professione prodiderant, quasi hoc euasuri inretientes illos diaboli laqueos uiderentur, quo non minus quam si ad nefarias aras accessissent hoc ipso quod ipsum contestati fuerant tenerentur, sed etiam aduersus illos qui accepta fecissent, licet praesentes cum fierent non adfuissent

  1. Ce sont les mots du clergé Romain.