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ici-bas. Il écrivit un dialogue intitulé Phédon ou l’immortalité de l’âme, qui, par l’attrait et la clarté du style, ressemble au dialogue de ce nom composé par Platon, mais où les arguments sont tout autres.

Son point de départ, dans cet ouvrage, est l’existence de Dieu, à laquelle il croit avec une absolue conviction. Dieu, dit-il, a créé l’âme comme il a créé le corps. Du moment que le corps ne disparaît pas après la mort, mais se transforme en d’autres éléments, l’âme, qui est une substance simple, peut encore moins disparaître. Si notre âme était sujette à la destruction, toutes nos pensées ne seraient que des illusions par lesquelles Jupiter veut nous duper ; nous ressemblerions aux animaux, dont la destinée est de manger et de mourir. Donc, les idées de l’homme affirmant une vie future sont également vraies et répondent à une réalité.

Par son Phédon, Mendelssohn espérait émouvoir les cœurs et porter la conviction dans les esprits en faveur de la croyance à l’immortalité de l’âme. Il réussit au delà de toute prévision. Le Phédon fut traduit en plusieurs langues, et naturellement aussi en hébreu ; tout le monde voulait le connaître. Théologiens, philosophes, artistes, poètes (Herder, Gleim), le jeune Goethe, hommes d’État et princes lurent cet ouvrage avec une religieuse ferveur et manifestèrent cour l’auteur un enthousiasme qui, de nos jours, fait un peu sourire. On était reconnaissant au philosophe juif d’avoir rendu une nouvelle vigueur à une croyance réconfortante que la religion seule ne suffisait plus à faire accepter avec une entière confiance. Le duc de Brunswick s’efforçait de l’attirer dans son pays, le prince de Lippe-Schaumbourg le traitait en ami et en confident. L’Académie des sciences de Berlin voulut l’élire parmi ses membres, mais Frédéric le Grand raya son nom de la liste des présentations. Deux Bénédictins le consultèrent comme directeur de conscience, lui demandant de leur faire connaître les principes philosophiques et moraux dont ils devaient s’inspirer dans leur vie.

Malgré sa célébrité et les conseils insidieux de quelques-uns de ses admirateurs, Mendelssohn resta fermement attaché au judaïsme. Jean-Gaspard Lavater, pasteur évangélique de