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assez bien l’hébreu pour pouvoir lire à son père, tombé malade, les consultations talmudiques qui lui étaient adressées et y répondre sous sa dictée. Ces trois filles épousèrent toutes des talmudistes distingués. L’un d’eux, Meïr, de Ramerupt (près de Troyes), eut trois fils remarquables, s’inspirant, comme les autres membres de la famille, de l’esprit de leur aïeul.

Sous l’influence de Raschi et de son école, la Champagne devint le centre de l’enseignement talmudique. Les savants français furent recherchés jusqu’en Espagne, et ce dernier pays dut partager désormais avec la France la direction du judaïsme. L’Espagne resta bien le pays classique de la poésie hébraïque, de la linguistique, de l’exégèse et de la philosophie, mais, pour la connaissance du Talmud, elle dut céder la palme à la France.

En Italie, on ne trouvait à cette époque ni poètes, ni savants juifs. Le seul Italien de ce temps qui occupe un certain rang dans la littérature juive est Nathan ben Yehiel, de Rome. Il composa (vers 1101), sous le titre d’Aroukh, un lexique talmudique. Cette œuvre, plus complète que les travaux antérieurs de ce genre, ne présente aucune originalité ; c’est une compilation, tirée d’écrits plus anciens.

C’est vers cette époque qu’on commence à trouver des traces certaines de Juifs dans l’Europe orientale. Il en existait, au Xe siècle, en Bohème, en Moravie et en Pologne. À en croire la communauté de Prague, elle serait une des plus anciennes agglomérations juives de l’Europe, et elle appuie sa prétention sur l’inscription d’une pierre tumulaire qui remonterait à un siècle avant le christianisme. Qui prouve trop ne prouve rien. C’est seulement à partir du r siècle qu’on trouve sûrement des Juifs en Bohème, où ils possédaient même des esclaves chrétiens. D’après une lettre d’une princesse de Moravie, les habitants juifs du faubourg de Prague et du village de Wyssegrad passaient pour être particulièrement riches. Cette princesse écrivit en effet à son beau-frère, avec lequel elle était en hostilités : Espères-tu trouver chez nous des gens riches ! Tu en rencontres un plus grand nombre dans ton propre pays. Le faubourg de Prague et Wyssegrad sont habités par des Juifs excessivement opulents. En Moravie, il y avait également des Juifs au XIe siècle. Un d’eux, appelé Podiva, fit construire