Vers 1488, presque tous les membres de la communauté étaient dans le- plus grand dénuement ; trente ans plus tard, il n’y avait plus que deux cents environ qui acceptaient l’aumône.
Chose plus importante, les mœurs s’améliorèrent également sous l’influence des Juifs sefardim. Jérusalem ne ressemblait plus à une caverne de brigands, comme au temps où Obadia di Bertinoro y arriva d’Italie et où une administration rapace, sans foi ni scrupules, opprimait et maltraitait les membres de la communauté et les poussait au désespoir ou à l’émigration. Tous étaient, au contraire, animés d’un véritable esprit de conciliation, de concorde et de justice. On y faisait encore montre, il est vrai, d’une piété exagérée, mais cette piété n’était plus associée à une scandaleuse immoralité.
Cette heureuse modification dans les sentiments et les mœurs était due en très grande partie à l’action du prédicateur italien Obadia di Bertinoro, qui, pendant plus de vingt ans, apprit à ses coreligionnaires de Jérusalem, par la parole et l’exemple, à être pieux sincèrement, mais sans ostentation, et à montrer de l’élévation dans la pensée et de la générosité dans les actes. À son arrivée à Jérusalem, il écrivit à un parent : S’il se trouvait dans ce pays un Juif intelligent et capable de diriger un groupe important d’hommes avec modération et douceur, il serait obéi, non seulement des Juifs, mais aussi des musulmans. Il ne prévoyait pas encore, à ce moment, qu’il accomplirait lui-même cette belle mission d’améliorer la situation morale et intellectuelle des Juifs de Jérusalem. Grâce à ses manières affables et à sa profonde bonté, il réussit à désarmer la malveillance et à guérir les plaies dont souffrait la communauté et qu’il avait eu le courage de montrer à nu. Les paroles me font défaut, dit un pèlerin italien de Jérusalem, pour louer convenablement Obadia. Il est l’homme le plus respecté du pays, rien ne se fait que par son ordre, et tous lui obéissent. Quand il prêche, les assistants l’écoutent avec ferveur, dans un silence religieux. Obadia avait été soutenu dans sa noble entreprise par les Juifs de la péninsule ibérique réfugiés à Jérusalem.
On peut sans doute attribuer également à Obadia di Bertinoro et à ses collaborateurs les ordonnances, animées d’un esprit si élevé, que la communauté elle-même s’imposa comme lois permanentes