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le tiers de ses biens. À peine échappé à ce danger, le pauvre rabbin se voit accusé du meurtre d’un enfant chrétien et d’autres forfaits.

À Ratisbonne, le peuple croyait, en général, à sa culpabilité, et on était tout prêt, sur l’ordre du clergé, à le mettre à mort. Mais le Conseil de la ville craignit d’être rendu responsable de cette exécution, et, pour soustraire Israël Bruna à la fureur populaire, il le fit mettre en prison.

Très inquiète au sujet du dénouement de cette affaire, la communauté juive s’adressa, non seulement à l’empereur, mais aussi à Ladislas, roi de Bohème. Les deux souverains demandèrent avec instance que Bruna fût relâché sans payer aucune amende. Le Conseil était tout disposé à se conformer à leurs ordres, mais il craignait d’irriter l’évêque et la foule. Il eut donc recours au subterfuge suivant. Il fit amener Hans Bayol sur le pont de pierre, où l’attendait le bourreau, et là on l’engagea à dire la vérité avant de mourir. Bayol maintint ses accusations contre les Juifs en général, mais reconnut que Bruna était absolument innocent du meurtre de l’enfant, dont il l’avait incriminé. À la suite de cette rétractation et d’une nouvelle lettre de l’empereur, Bayol fut brûlé et Israël Bruna remis en liberté. Mais Bruna dut prêter serment qu’il ne tirerait jamais vengeance des souffrances qu’on lui avait infligées. Le malheureux vieillard ne songeait certes pas à se venger !

Sur ces entrefaites parvint à Ratisbonne la nouvelle du prétendu meurtre de l’enfant de Trente. L’évêque Henri, tout joyeux qu’une si bonne occasion s’offrit à lui pour persécuter impunément les Juifs et les faire souffrir pour la plus grande gloire du christianisme, demanda instamment au Conseil de Ratisbonne d’intenter un procès criminel à un certain nombre de Juifs de la ville. À la suite d’aveux arrachés par la torture, toute la communauté fut déclarée prisonnière. Jour et nuit, des gardes se tinrent près des quatre portes du quartier juif, ne permettant à personne d’entrer ou de sortir. Les biens de la communauté entière furent confisqués.

L’issue du procès qui, en son temps, causa une profonde sensation, fut aussi désastreuse pour la ville que pour les Juifs, car,