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assassiné, et un Juif baptisé formula contre ses anciens coreligionnaires les plus odieuses accusations. On répandit aussi le bruit qu’on avait découvert chez un rabbin, Moïse, une lettre, adressée de Saxe, pour réclamer du sana chrétien pour la prochaine Pâque. Bien plus, les inculpés eux-mêmes, soumis à la torture, déclarèrent qu’ils avaient martyrisé Simon et employé son sang pour la fête de Pâque, ajoutant que Brunetta avait fourni les épingles pour percer le corps. La douleur leur faisait avouer tout ce qu’on leur demandait. Un seul des prisonniers, Moïse, supporta courageusement tous les supplices plutôt que de reconnaître ces calomnies comme vraies. Bernardin triompha. Tous les Juifs de Trente furent brillés, et le séjour de cette ville fut interdit pour l’avenir aux Juifs. On dit que le médecin Tobias se donna lui-même la mort. Seuls quatre inculpés acceptèrent le baptême pour avoir la rie sauve.

Encouragés par ce premier succès, l’évêque de Trente, Bernardin et les moines de tout ordre eurent l’idée de se servir du cadavre de Simon pour nuire également aux Juifs des autres contrées. Ils le firent embaumer et le recommandèrent comme une sainte relique à la piété des fidèles. Des milliers de pèlerins allèrent le visiter ; il y en eut même qui virent une auréole rayonner autour de ces ossements. À force de le répéter aux autres, les inventeurs de cette lamentable histoire finirent par croire eux-mêmes au martyre de cet enfant, et de toutes les chaires de Trente les dominicains annoncèrent le nouveau miracle et s’élevèrent contre la perversité des Juifs. Deux jurisconsultes de Padoue, venus à Trente pour s’assurer par eux-mêmes de la réalité de l’auréole que tant de pèlerins voyaient briller autour du corps, furent presque tués par la foule, parce qu’ils prétendaient ne rien apercevoir. Dans tous les pays chrétiens informés de cet événement, les Juifs furent de nouveau exposés aux plus grands dangers. En Italie même, ils ne pouvaient plus sortir hors des villes sans risquer d’être assommés par la populace.

À la suite des plaintes des Juifs, menacés dans leurs biens et leurs personnes, le doge Pietro Mocenigo et le sénat de Venise invitèrent le podestat de Padoue à les défendre énergiquement contre toute agression et à interdire les prédications fanatiques