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ne peut pas prouver son dire par le témoignage de personnes véridiques, c’est lui qui sera condamné à mort. Casimir espérait ainsi mettre fin à ces odieuses calomnies de meurtre rituel, qui avaient déjà fait tant de victimes parmi les Juifs. Le roi laissait aussi aux Juifs leur juridiction spéciale. Les procès criminels entre Juifs seuls ou entre Juifs et chrétiens devaient être soumis, non pas aux tribunaux ordinaires, mais à un tribunal, composé du palatin, ou de son suppléant, et de Juifs. Pour les affaires de peu d’importance, les anciens (rabbins) de la communauté seuls avaient à en connaître. Ils avaient également le droit de punir d’une amende le refus de comparaître. Ce fut avec l’assentiment des magnats polonais que Casimir accorda ces importants privilèges aux Juifs. Il confirma aussi (1446) les prérogatives que les Caraïtes de Troki, Luzk et autres cilles avaient obtenues, au XIIIe siècle, de Witold, duc de Lithuanie.

Le clergé voyait d’un mauvais œil les Juifs jouir en Pologne d’une existence calme et heureuse, et il résolut d’y faire mettre fin par le roi Casimir. Il y avait alors à la tête du clergé polonais le puissant évêque de Cracovie, le cardinal Zbigniew Olesnizki. Invité par ce prélat à venir prêcher en Pologne contre les hussites, Capistrano se rendit à Cracovie, où il reçut un accueil triomphal du roi et des ecclésiastiques. Pendant toute la durée de son séjour dans cette ville (1453-1454), il ne cessa, avec le concours de l’évêque Zbigniew, d’exciter le roi contre les hussites et les Juifs. Il faisait des remontrances publiques à Casimir, le menaçant de tous les supplices de l’enfer et lui prédisant finalement qu’il serait défait dans sa guerre contre l’ordre des chevaliers de Prusse, s’il ne se décidait à abolir les privilèges des Juifs et à abandonner les hérétiques hussites à la colère des ecclésiastiques.

Dès que les chevaliers prussiens, aidés de leurs collègues d’Allemagne, eurent, en effet, battu l’armée polonaise et obligé Casimir à s’enfuir honteusement du champ de bataille (septembre 1454), le clergé fut maître de la situation. Il répandit le bruit, en Pologne, que cette défaite était un châtiment envoyé par Dieu, pour punir Casimir de sa bienveillance à l’égard des Juifs et des hérétiques. Furieux de son échec, le roi était résolu à recommencer une vigoureuse campagne contre les Prussiens, mais il ne