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il partagea la succession paternelle avec ses frères, il jeta dans la mer, afin de n’en tirer aucun profit, l’argent qu’il avait reçu comme compensation pour la part qui lui revenait des idoles. Aquilas s’illustra par sa nouvelle traduction grecque de l’Écriture sainte. Il conçut le projet de donner de la Bible une traduction simple et définitive parce qu’il avait vu avec quelle excessive liberté les chrétiens traitaient la vieille traduction grecque. Comme ces derniers lisaient la Bible pendant le service divin et qu’ils se servaient pour cette lecture de la traduction alexandrine des Septante, il leur importait beaucoup de trouver dans ce texte des allusions au Christ. De là, dans le texte grec qu’ils considéraient comme sacré, les altérations et les additions nécessaires pour introduire dans l’Écriture sainte des prophéties au sujet de la mission et de la divinité de Jésus. Ainsi les docteurs de l’Église invoquent à l’appui de la religion chrétienne certains passages de la Bible qui ne se trouvent ni dans le texte hébreu ni dans la version originale des Septante. Les sectes gnostiques, comme les chrétiens, arrangeaient le texte biblique de façon à le rendre favorable à leur doctrine. L’école d’un certain Aréimion est formellement accusée d’avoir altéré l’ancienne traduction grecque. Les Judéens, de leur côté, opposaient aux modifications introduites par les chrétiens d’autres modifications ayant pour but de faire disparaître toute allusion qui aurait pu être appliquée à Jésus. La version des Septante était devenue en quelque sorte un champ de bataille où luttaient des adversaires acharnés ; les traces de cette lutte sont encore visibles en partie dans les altérations du texte original.

Cependant une bonne traduction grecque de la Bible était absolument nécessaire aux Judéens de langue grecque pour la lecture qu’ils faisaient au temple de la Thora et des Prophètes. L’usage régnait alors de traduire en langue vulgaire les chapitres de la Thora qui étaient récités dans les synagogues. Cette circonstance engagea Aquilas, qui connaissait l’hébreu et le grec, à faire une nouvelle traduction qui mît fin aux interprétations fantaisistes des Judéens et des chrétiens. Il s’en tint strictement au texte hébreu, qu’il traduisit mot à mot avec une scrupuleuse exactitude. Lorsqu’il fut devenu le disciple d’Akiba et qu’il eut adopté le système d’interprétation de son maître, il modifia en partie sa