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vaient de raison d’être et de véritable signification que dans le sanctuaire. Le premier soir de la Pâque, on célébrait la sortie d’Égypte par une cérémonie dont les symboles rappelaient d’une façon particulièrement frappante le sacrifice de l’agneau pascal. La chute de l’État et l’incendie du temple avaient fait naître dans tous les esprits un sentiment de sombre et profonde tristesse, et ce sentiment était entretenu avec soin par l’enseignement des docteurs : « Celui qui s’afflige sincèrement sur la chute de Jérusalem, disaient ils, assistera à l’éclatante et glorieuse résurrection de cette ville. » On adopta pour cette raison certains signes de deuil. Ainsi, aux maisons crépies à la chaux, on laissait un endroit qui n’était pas blanchi ; les femmes ne devaient pas se parer de tous leurs bijoux à la fois, mais en laisser quelques-uns de côté « en souvenir de Jérusalem ; » il était recommandé au fiancé de ne pas porter de couronne comme autrefois le jour du mariage et de ne pas faire jouer devant lui de certains instruments. Mais le deuil se manifestait surtout par le jeûne. On rétablit, après la destruction du second temple les quatre jours de jeûne que les exilés de Babylone s’étaient volontairement imposés après la chute du premier temple. Il y eut des Judéens qui jeûnaient même chaque semaine. Seuls, les jours qui rappelaient une victoire ou quelque autre heureux événement (Yemè Meguillat Taanit) ne pouvaient pas devenir de jours de jeûne. Les docteurs ne voulaient pas que les souvenirs de temps plus fortunés pussent s’effacer de la mémoire du peuple.

Les règles de pureté édictées pour les Lévites restèrent également en vigueur, au moins en partie ; elles avaient été trop intimement mêlées au développement religieux des Judéens pour disparaître complètement avec le temple. Les gens pieux prenaient les mêmes mesures de précaution pour goûter des aliments ordinaires que pour manger la dîme, l’oblation sacerdotale ou la viande des sacrifices. On évitait avec soin le contact de personnes ou d’objets qui, d’après la Loi, communiquaient une souillure, et on ne faisait usage que de vêtements et de vases fabriqués conformément aux prescriptions de pureté. Ceux qui se soumettaient à ces règles sévères et donnaient régulièrement la dîme des fruits