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les Juifs relaps. À la fin de leur écrit au roi, ils insistèrent sur l’intérêt qu’il y aurait à obliger les marchands d’esclaves juifs et chrétiens à vendre les esclaves païens dans des pays chrétiens.

Charles le Chauve ne tint nul compte des décisions des évêques, et, quoique son favori Hinkmar en fît partie, il fit dissoudre le concile. Plus tard, sur son ordre, un nouveau concile se réunit à Paris (14 février 846) pour examiner les modifications à apporter à l’organisation de l’Église ; le roi leur défendit de s’occuper, dans cette assemblée, des Juifs. Ni sous les Carolingiens, ni plus tard, aucune loi humiliante ne fut promulguée contre les Juif. Charles n’imposa qu’une légère restriction aux commerçants juifs en les obligeant à payer au fisc 11 pour 100 de leurs revenus, tandis que les autres marchands n’en versaient que le dixième.

Pour effacer l’échec que les adversaires des Juifs avaient subi au concile de Meaux, Amolo conseilla au haut clergé d’agir sur les princes et les seigneurs afin qu’ils abolissent les privilèges des Juifs. La lettre qu’il envoya dans ce but aux prélats forme un digne pendant à l’acte d’accusation adressé par Agobard à Louis le Débonnaire ; on y retrouve, du reste, en grande partie les griefs énumérés par Agobard. Vers la fin de son écrit, Amolo exprime le regret que les Juifs jouissent en France de la liberté de la parole et puissent employer pour leurs travaux domestiques et agricoles des ouvriers chrétiens. Il se plaint aussi que les chrétiens déclarent publiquement que les prédicateurs juifs parlent mieux que les prêtres chrétiens et que Bodo se soit converti au judaïsme. Comme si les Juifs pouvaient être rendus responsables des actes et des paroles des chrétiens !

D’abord l’écrit envenimé d’Amolo n’eut pas plus de résultat que les plaintes d’Agobard et les décisions du concile de Meaux. Mais, peu à peu, ces calomnies se répandirent parmi la noblesse et le peuple, et quand la France eut été morcelée en petits États autonomes et indépendants de la souveraineté royale, elles agirent d’une façon dangereuse pour les Juifs sur les ecclésiastiques et les princes. À Béziers, l’évêque de ce temps prononçait chaque année des sermons enflammés, depuis le dimanche des Rameaux