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eurent conscience de leur puissance et s’arrogèrent le privilège de nommer eux-mêmes les princes de l’exil. Aussi la dignité d’exilarque, qui avait été héréditaire depuis Bostanaï, devint-elle élective à partir de l’échec subi par Anan. Après Hanania ou Ahunaï, dix ans, à peine, après la fondation du caraïsme, s’éleva une nouvelle compétition au sujet de l’exilarcat entre deux prétendants, Zakkaï ben Akunaï et Natronaï ben Habibaï, membre du Collège sous Jehudaï. Grâce aux efforts des deux chefs d’école de ce temps, Malka ben Aha, de Pumbadita (771-73), et Haninaï Kahana ben Huna, de Sora (765-75), Natronaï échoua, il fut même, par ordre du khalife, banni de la Babylonie. Il se rendit à Kairouan, où, depuis la fondation de cette ville, se trouvait une communauté juive importante. Natronaï était un talmudiste remarquable, le fait suivant le prouve. Sollicité par les communautés juives de l’Espagne de leur envoyer un exemplaire du Talmud, il en copia un de mémoire. Quand son rival eut été banni, Zakkaï fut naturellement élevé par les gaonim à la dignité de prince de l’exil.

Vers l’époque où naquit le caraïsme, se produisit un événement qui eut parmi les Juifs un retentissement considérable. Le roi païen d’une peuplade barbare du nord embrassa le judaïsme, et toute sa cour le suivit dans sa conversion. Les Khazars ou Khozars, d’origine finnoise et apparentés avec les Bulgares, les Avares et les Ugures ou Hongrois, s’étaient établis, après la dissolution de l’empire des Huns, aux confins de l’Europe et de l’Asie. Ils avaient fondé un petit royaume à l’endroit où le Volga (qu’ils appelaient Itil ou Atel) se jette dans la mer Caspienne et où demeurent actuellement des Kalmoucks, dans le voisinage d’Astrakan. Conduits à la guerre par un chef appelé chakan (chagan), ils avaient inspiré une telle terreur aux Perses qu’un des rois de ce peuple, Kosru, dans le but de protéger son royaume contre leurs incursions, éleva un mur pour fermer l’espace compris entre le Caucase et la mer. Les Khazars ne se laissèrent pas arrêter longtemps par cette porte des portes (Bâb al-abwâb, près de Derbend). Après la chute du royaume perse, ils passèrent le Caucase, envahirent l’Arménie et s’emparèrent de la presqu’île de Crimée, qui porta pendant quelque temps le nom de Khazarie. Les empereurs