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leur pays que parce qu’ils étaient peu satisfaits de leur situation.

Sérène finit misérablement. Il fut fait prisonnier et amené devant le khalife Yézid, successeur d’Omar II. Accusé d’avoir voulu tromper les Juifs, il nia s’être présenté sérieusement comme le Messie. Le khalife le remit alors aux Juifs eux-mêmes, pour le châtier de sa supercherie. Ses partisans voulurent rentrer dans la communauté juive, dont ils s’étaient séparés en transgressant les prescriptions talmudiques. Fallait-il les recevoir comme des pécheurs repentants ou comme des prosélytes ? La question fut soumise au chef de l’académie de Pumbadita, Natronaï ben Nehemia, surnommé Mar Yanka (719-730). Ce docteur déclara qu’on pouvait les accueillir comme israélites, mais qu’ils devaient faire pénitence dans les synagogues et déclarer publiquement qu’ils observeraient dorénavant les lois du Talmud ; ils étaient, en outre, soumis à la flagellation.

À cette époque, il y eut également des Juifs qui ne suivaient même pas les prescriptions bibliques, ils n’observaient pas le sabbat, mangeaient du sang, ne tuaient pas les animaux selon le rite, et cependant n’étaient ni chrétiens, ni musulmans. On ne sait pas dans quelle région avaient vécu ces Juifs, qui vinrent demander à Natronaï de les admettre de nouveau parmi les fidèles.

Trente ans après l’échec de Sérène, se produisit, sur un autre théâtre, un nouveau mouvement antitalmudique, inspiré par des espérances messianiques. Cette agitation était l’œuvre d’un homme extravagant et très courageux, Obadia Abou-Isa ben Ishak, de la ville d’Ispahan. Ses adhérents racontaient comme une chose merveilleuse qu’il ne savait même pas lire l’hébreu ; c’était exagéré, il connaissait la Bible et le Talmud. Guéri de la lèpre, il vit dans ce fait un miracle et se crut appelé à de hautes destinées, il se présenta, non comme le Messie, mais comme son précurseur, chargé de lui frayer la route. Sa foi dans sa mission était absolue, il était profondément convaincu que Dieu l’avait chargé de délivrer les Juifs de l’oppression. Comme Sérène, il introduisit certaines modifications dans le judaïsme, mais elles ne sont pas connues. On sait seulement qu’il interdit le divorce, même en cas d’adultère, ajouta une quatrième prière quotidienne aux trois qui