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dant la persécution, avaient embrassé le christianisme. Ils durent abjurer de nouveau le judaïsme et rentrer dans le giron de l’Église ; la fuite était impossible, les châtiments les plus sévères menaçaient ceux qui, après avoir reçu le baptême, se cachaient ou essayaient de quitter le pays. On croyait rendre leur conversion plus sincère en les forçant de nouveau à signer une formule d’abjuration (placitum Judœorum). Les Juifs de la capitale Toletum (Tolède) signèrent, le 18 février 654, pour le roi Receswinth, un acte de foi dans lequel ils déclaraient : « que déjà sous le roi Chintila ils avaient fait vœu de persister dans la religion chrétienne, mais que leur incrédulité et leurs erreurs héréditaires les avaient empêchés de reconnaître la divinité du Christ ; que maintenant ils promettaient, de par leur libre volonté, eux, leurs femmes et leurs enfants, de ne plus observer les rites et usages des Juifs ; qu’ils s’abstiendraient d’entretenir des relations condamnables avec des Juifs non baptisés, de se marier entre parents (oncles et nièces), d’épouser des femmes juives, d’accomplir les cérémonies du mariage juif, de pratiquer la circoncision, de célébrer la Pâque, le sabbat et les autres fêtes juives, de suivre les prescriptions alimentaires et, en général, tous les usages abominables du judaïsme ; qu’ils s’engageaient, au contraire, à reconnaître sincèrement les enseignements des évangiles et les traditions apostoliques et à observer sans détours ni hypocrisie les lois de l’Église ; que, tout en ne pouvant pas surmonter leur répugnance pour la chair de porc, à laquelle il leur était impossible de goûter, ils promettaient de manger sans aversion ce qui était cuit avec le porc ; que quiconque d’entre eux violerait un de ces engagements périrait de leurs propres mains ou des mains de leurs fils par le feu ou la lapidation ; qu’ils juraient par la Trinité de rester fidèles à cette déclaration. » Il est très probable que dans les autres villes du royaume hispano-visigoth les Juifs furent contraints de signer des actes semblables. Ils durent néanmoins payer la taxe imposée aux Juifs, le fisc ne voulait pas que leur conversion lui fût préjudiciable.

Receswinth savait que la noblesse du pays défendait les Juifs et permettait à ceux d’entre eux qui avaient été baptisés de force de vivre selon leur conscience, il promulgua un édit en vertu duquel nul chrétien ne devait protéger ceux qui pratiquaient en