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il eut pour successeur Hunaï. Pendant que celui-ci dirigeait l’académie de Sora, l’école de Pumbadita avait à sa tête Mar-Râba (vers 670-680). Hunaï et Mar-Râba prirent une mesure très importante, qui abolissait une loi talmudique. D’après le Talmud, la femme, même dans le cas où son mari est atteint d’une maladie rebutante ou exerce une profession répugnante, ne peut demander le divorce que très rarement ; elle est obligée de rester avec son mari, même quand elle éprouve pour lui une insurmontable aversion. Persiste-t-elle dans sa demande de divorce, elle est menacée de perdre son douaire et même sa dot. L’avènement de l’islamisme modifia cette situation. Comme le Coran permettait à l’épouse de demander la répudiation, les femmes juives s’adressaient quelquefois aux tribunaux musulmans ; ceux-ci forçaient le mari à consentir au divorce et à restituer à la femme ce qui lui était dû. C’est alors que Hunaï et Mar-Râba autorisèrent l’épouse, contrairement au droit talmudique, à exiger la répudiation sans qu’il en résultât pour elle aucune perte pécuniaire.

Les successeurs de ces deux gaonim, jusqu’à 720, ne sont connus que de nom ; l’histoire du judaïsme babylonien pendant toute cette période est restée absolument obscure. On sait seulement que, dans ces quarante années (680-720), les trois dignitaires juifs (l’exilarque et les chefs des deux écoles de Sora et de Pumbadita) fixèrent entre eux l’étendue de leurs pouvoirs respectifs par des arrangements à l’amiable et des concessions mutuelles, et que les communautés babyloniennes furent définitivement réorganisées.

À la tête de ces communautés se trouvaient l’exilarque et les deux chefs d’académie. L’exilarque avait des fonctions politiques, il représentait le judaïsme babylonien auprès du khalife et des gouverneurs et recueillait les impôts dus par les communautés à la caisse de l’État. Ce dignitaire déployait un faste presque royal ; il portait un costume somptueux, sortait dans les carrosses de l’État, avait sa garde du corps et jouissait, en général, d’une très grande considération. Les deux gaonim ou chefs des académies de Sora et de Pumbadita maintenaient l’unité religieuse, ils dirigeaient l’enseignement talmudique, promulguaient de nouvelles lois et en surveillaient l’exécution ; ils partageaient le