Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/302

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fut plus difficile de faire entrer la tribu juive des Kouraïza dans cette ligue. Le chef des Benou-Kouraïza, Kaab ibn Assad, refusa même d’abord d’accorder un asile à Houyey, parce que sa tribu avait conclu une alliance avec les musulmans. Mais, éclairé sur les dangers communs qui menaçaient tous les Juifs arabes, il consentit enfin à prendre part à la guerre contre le prophète. Dix mille alliés entrèrent en campagne et marchèrent sur Médine, dont ils crurent pouvoir s’emparer sans coup férir ; ils se heurtèrent contre de solides retranchements que Mahomet, averti par un traître, avait fait élever à la hâte. Les assaillants s’épuisèrent en vains efforts pour s’emparer de la ville. À la fin, Mahomet réussit à semer la discorde parmi les confédérés, qui retournèrent chez eux.

La guerre des tranchées, comme on l’appela, fut donc un nouveau succès pour Mahomet ; ce furent les Juifs qui supportèrent les fâcheuses conséquences de l’échec des confédérés. Dès que ces derniers se furent éloignés de Médine, le prophète marcha immédiatement avec trois mille hommes contre les Kouraïza. Ceux-ci, trop faibles pour livrer bataille en rase campagne, se retranchèrent derrière les remparts de leurs châteaux forts. Après un siège de vingt-cinq jours (février-mars 627), ils n’eurent plus de vivres et songèrent à capituler. Ils demandèrent au prophète de les traiter comme les Nadhir, c’est-à-dire de les laisser émigrer avec leurs femmes, leurs enfants et une partie de leurs biens. Mahomet refusa ; il voulut qu’ils se rendissent à discrétion. Près de sept cents Juifs, et parmi eux les chefs Kaab et Houyey, furent égorgés sur une place publique de Médine, et leurs cadavres entassés dans une seule et même fosse. L’endroit où cette exécution eut lieu fut nommé le marché des Kouraïza. Ce forfait fut accompli au nom de Dieu : Voici ce qu’en dit le Coran : « Dieu a expulsé de leurs forts ceux des gens de l’Écriture qui aidaient les alliés et a jeté la terreur dans leurs cœurs ; vous avez tué les uns, vous avez réduit les autres en captivité. Il vous a donné en partage leurs maisons, leurs richesses et leur pays, que vous n’aviez jamais foulé jusqu’alors de vos pieds. Dieu est tout-puissant. » Les femmes furent échangées contre des armes et des chevaux. Mahomet se choisit comme concubine, parmi les captives, une jeune fille juive d’une