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tions alimentaires, les fêtes, le jeûne de Kippour, qu’ils nommaient Aschuna, et le sabbat ; en ce jour, ils s’abstenaient même de faire la guerre. Malgré le rôle considérable qu’ils jouaient en Arabie et la situation heureuse qu’ils y occupaient, ils aspiraient à retourner dans la Terre Sainte et appelaient de leurs vœux la venue du Messie. Pendant les prières ils se tournaient vers Jérusalem. Ils étaient en relation avec leurs frères de la Palestine, et, après la disparition du patriarcat, ils se soumirent aux autorités religieuses de Tibériade. Yathrib était, en Arabie, le centre de l’enseignement religieux juif, il s’y trouvait une école (midnas) et quelques savants (abhâr, habar), mais leur science était bien restreinte. Doués d’une brillante imagination, les Juifs arabes se plurent surtout à enrichir l’histoire biblique de traits fantaisistes, que le peuple prit ensuite pour des faits réels. Ils profitèrent de la large tolérance dont ils jouissaient pour exposer librement leurs vues religieuses et essayer de les faire partager à leurs voisins païens. Les Arabes trouvaient plaisir aux histoires à la fois naïves et sérieuses de la Bible, à ses récits si fortement empreints de poésie, et peu à peu ils se familiarisèrent avec une partie de la Bible et un certain nombre des conceptions religieuses des Juifs. Ceux-ci communiquèrent aussi aux Arabes leur calendrier, ils leur enseignèrent à ajouter un mois supplémentaire à certaines années et leur firent adopter le cycle de dix-neuf ans (vers 420). Détail assez curieux, les Arabes appelaient l’intervalation du mois supplémentaire « Nassi, » probablement parce que, chez les Juifs, le Nassi ou patriarche faisait le calendrier des fêtes.

Les Arabes ne possédaient aucune tradition sur leur origine, ce fut les Juifs qui leur en créèrent. Il était pour les Juifs du plus haut intérêt d’être considérés comme apparentés avec les Arabes. En effet, la ville sainte de La Mecque était un asile inviolable pour ceux qui s’y réfugiaient. De plus, il y avait dans l’année quatre mois sacrés qui formaient une espèce de trêve de Dieu, pendant laquelle on ne pouvait livrer aucun combat ; les cinq foires de l’Arabie ne pouvaient également être tenues que pendant ces mois. Mais, pour jouir du droit d’asile à La Mecque et des privilèges attachés à la période sacrée de l’année, il fallait être apparenté avec les Arabes.