avoir entendu raconter par leurs pères que, lors de la destruction du premier temple par Nabuchodonosor, des fugitifs juifs étaient venus jusque dans le nord de l’Arabie. En tout cas, il est hors de doute que, pour fuir devant les persécutions des Romains, de nombreux Juifs s’avancèrent jusque dans la presqu’île Arabique, où ils se divisèrent en trois tribus : les Benou-Nadhir, les Benou-Kuraïza et les Benou-Nakdal, dont les deux premières descendaient d’Aaron et portaient le nom de Kohanim (Alkahinani). Une autre tribu juive, les Benou-Kainukaa, habitait le nord de l’Arabie. Le centre de toutes ces tribus était la ville de Yathrib, située dans une région couverte de palmiers et de rizières, et arrosée par de nombreux petits cours d’eau. Pour se défendre contre les attaques des Bédouins, elles élevèrent des châteaux forts dans la ville et aux environs. À l’origine, elles étaient les seuls possesseurs de cette région, mais plus tard (vers 300), elles durent en céder une partie à deux tribus arabes, les Benou-Aus et les Khazradj (appelés ensemble les tribus Kaïla), avec lesquels elles vécurent tantôt en amies, tantôt en ennemies.
Sur le territoire de Khaïbar, au nord de Yathrib, demeuraient aussi de nombreux Juifs, que la tradition faisait descendre des Rêkabites. Ces derniers, sur l’ordre de leur aïeul Yonadab ben Rèkab, vivaient en nomades et en naziréens, et, à ce que raconte la légende, s’avancèrent, après la chute du premier temple, jusque dans la région de Khaïbar. Les Juifs de ce pays possédaient toute une série de forts, dont le plus important s’élevait sur une montagne escarpée. Wadi-l-Kora (la vallée des bourgs), une vallée très fertile, avait une population juive très importante. À La Mecque, où se trouvait le sanctuaire des Arabes, ne demeuraient que peu de Juifs. Ils étaient, par contre, très nombreux dans le Yémen, région dont, selon les paroles des habitants, la poussière était de l’or, où les hommes étaient vigoureux, où les femmes enfantaient sans douleur. Mais, différents en cela de leurs frères du Hèdjaz, les Juifs de l’Arabie-Heureuse n’étaient unis entre eux par aucun lien politique ou administratif, ils vivaient disséminés parmi les Arabes. Ils n’en prirent pas moins un ascendant considérable sur les tribus et les rois du Yémen, au point de pouvoir empêcher pendant quelque temps le développement du christianisme dans