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remonte au temps de la République ou de César. Des marchands juifs étaient venus d’Alexandrie et de l’Asie Mineure jusqu’à Rome et en Italie, il y en eut sans doute qui s’avancèrent jusque dans la Gaule. D’autre part, quand Vespasien et Titus disséminèrent leurs prisonniers juifs aux quatre coins de l’empire romain, il est probable qu’il en pénétra jusqu’en Gaule. Mais c’est seulement au (iie siècle que la présence des Juifs est signalée d’une façon certaine dans l’Europe occidentale.

Les Juifs de la Gaule, qu’ils soient vertus dans cette région comme marchands ou comme fugitifs, eurent tous les droits de citoyen romain, et ces droits leur furent maintenus par les Francs et les Burgondes. Au moment de l’invasion de ces peuples, les Juifs étaient répandus en Auvergne (Arverne), à Carcassonne, Arles, Orléans, et, dans le Nord, jusqu’à Paris et en Belgique. Il y en avait également à Marseille, Béziers (Beterræ) et dans la province de Narbonne, où ils étaient en assez grande quantité pour qu’une montagne, près de Narbonne, fût appelée « Mont-Juif » (mons judaïcus). Les relations commerciales des Juifs de cette contrée s’étendirent, paraît-il, jusqu’en Chine et aux Indes. La région de Narbonne appartint pendant quelque temps aux Visigoths de l’Espagne ; les habitants juifs qui y demeuraient partagèrent alors les vicissitudes de leurs frères d’au delà des Pyrénées.

Chez les Francs commis chez les Burgondes, les Juifs pouvaient pratiquer librement l’agriculture, professer des métiers ou se livrer au commerce ; les fleuves et les mers étaient sillonnés de leurs vaisseaux. Ils exerçaient aussi la médecine, et bien des ecclésiastiques qui n’avaient pas une confiance absolue dans l’intervention miraculeuse des saints ou la vertu curative des reliques recouraient à leurs conseils. Le métier des armes leur était également familier, et ils prirent une part active aux combats que Clovis et les généraux de Théodoric se livrèrent près d’Arles (508). Outre les noms bibliques, les Juifs de la Gaule portaient aussi les noms usités dans le pays, ils s’appelaient Armentarius, Gosolas, Priscus, Siderius. Leurs relations avec les chrétiens étaient des plus cordiales, les ecclésiastiques s’asseyaient à leurs tables et, à leur tour, invitaient leurs hôtes ; les unions mixtes n’étaient pas rares entre Juifs et chrétiens. Les hauts dignitaires du