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demeure de punir les coupables et de faire rebâtir les synagogues à leurs frais. Comme on ne découvrit pas les coupables, ce fut la municipalité qui fut condamnée à reconstruire les synagogues.

Les Juifs d’Italie ne paraissent pas avoir connu les mœurs grossières et corrompues qui régnaient alors dans ce pays, car la littérature politique et ecclésiastique d’alors, qui ne les ménageait pas, ne leur reprochait que leur entêtement et leur incrédulité. L’ancien ministre de Théodoric, Cassiodore, qui s’était fait moine et avait composé, entre autres ouvrages, un commentaire homilétique sur les Psaumes, apostrophe souvent les Juifs dans cet écrit ; il voulait à toute force les convertir à sa religion. Quand il vit que ses tentatives restaient infructueuses, il les accabla d’injures, les appelant scorpions, lions, ânes sauvages, chiens et licornes. Malgré ces diverses vexations, les Juifs italiens furent relativement heureux sous Théodoric, et, après lui, sa fille, la belle et savante Amalasunthe, et son époux et meurtrier Théodat les traitèrent également avec équité. Les Juifs témoignèrent leur reconnaissance à Théodat en montrant pour sa cause un sincère attachement. Bélisaire, le vainqueur des Vandales, le vaillant héros, qui tremblait devant son maître Justinien et le servait avec un dévouement absolu, s’était emparé de toute la Sicile et du sud du continent italien et s’avançait à grands pas vers Naples, la plus grande ville de la basse Italie. Devant la sommation qu’il leur fit de lui livrer la ville, les Napolitains se divisèrent en deux partis. La plupart des habitants refusèrent de combattre pour maintenir en Italie la domination détestée des Ostrogoths ; seuls, les Juifs et deux dignitaires qui devaient leur haute situation aux rois ostrogoths s’opposèrent à la reddition de la ville. Les Juifs promirent de consacrer leurs biens et leur vie à la défense de Naples, et ils tinrent parole. Pour soutenir plus longtemps le siège, ils achetèrent de leur argent une quantité considérable de provisions, et ils défendirent avec une si vaillante opiniâtreté la partie de la forteresse confiée à leur garde que l’ennemi n’osa pas attaquer le côté où ils se trouvaient. Leur héroïsme, auquel un historien de ce temps, Procope, a rendu un éclatant hommage, ne put sauver la ville, les ennemis y pénétrèrent par ruse ; les Juifs se firent tuer presque tous à leur poste. On ne sait pas quel sort