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Quand les Juifs de ce pays apprirent la défaite des chrétiens et les progrès continus de l’armée perse, ils éprouvèrent un ardent désir de prendre part à la lutte. Ils pensèrent que l’heure avait enfin sonné où ils pourraient se venger des maux dont les Romains et les chrétiens les accablaient depuis des siècles ! Sur l’instigation d’un certain Benjamin, de Tibériade, qui consacra son immense fortune à fomenter des troubles et à armer des soldats juifs contre les Romains, un appel fut adressé à tous les Juifs de la Palestine pour les engager à se joindre à l’armée perse. À cet appel, les robustes Juifs de Tibériade, de Nazareth et des montagnes de la Galilée vinrent se ranger en foule sous le drapeau des Perses. Il est probable qu’ils massacrèrent auparavant les chrétiens et saccagèrent les églises de Tibériade ; ils s’unirent aux soldats de Scharbarzar pour marcher sur Jérusalem et reprendre la ville sainte aux chrétiens. En route, ces troupes furent rejointes par les Juifs du sud de la Palestine et par des bandes de Sarrasins. Jérusalem fut emportée d’assaut (juillet 614). On dit que 90 000 chrétiens furent tués dans la ville. La chronique ajoute que les Juifs auraient racheté aux Perses leurs prisonniers chrétiens pour les faire mourir ; cette accusation ne repose sur aucun fait précis. Couvents et églises furent brûlés à Jérusalem par l’ennemi. Il est probable que les Juifs prirent une plus grande part à ces scènes de destruction que les Perses, parce qu’ils estimèrent que la ville sainte n’était pas moins souillée par la présente de la croix et des reliques des martyrs qu’elle l’avait été autrefois par les idoles d’Antiochus Épiphane et d’Adrien.

Appelés par leurs coreligionnaires de Tyr, des Juifs de Jérusalem, de Tibériade, de Galilée, de Damas et même de Chypre marchèrent sur cette ville, au nombre de près de 20 000, dans l’espoir de surprendre les chrétiens et de les massacrer dans la nuit de Pâques. Les chrétiens, informés de ce projet, prirent les devants, ils s’emparèrent des Juifs de Tyr, les jetèrent en prison, fermèrent les portes de la ville et attendirent l’arrivée de leurs ennemis. Ceux-ci, trouvant les chrétiens prêts à se défendre, se mirent à dévaster les églises construites aux environs de Tyr. Chaque fois que les chrétiens de cette ville apprenaient qu’une église avait été détruite, ils tuaient cent de leurs prisonniers juifs et