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double du Christ. Même Jérusalem, qui, malgré la destruction du temple, était restée la capitale religieuse des Juifs, avait cessé d’être le centre du judaïsme ; les chrétiens s’en étaient emparés, y avaient fondé un évêché et en défendaient l’accès aux premiers possesseurs depuis que l’impératrice Hélène, la mère de Constantin, dont la réputation de jeune fille n’était pas sans tache, avait eu la pensée d’y faire construire, en expiation de ses fautes, l’église du Saint-Sépulcre. Seule la jolie ville de Tibériade avait conservé son rang, elle était restée le siège de l’activité religieuse des Juifs, et, grâce aux descendants de Mar-Zutra qui s’y étaient établis, son école continuait à jouir en Palestine et au dehors d’une très grande autorité. Le roi juif de l’Arabie lui-même se soumettait aux ordres venus de Tibériade. Mais là aussi le christianisme avait élu domicile en y établissant un évêché. Il est probable qu’à Nazareth, le berceau du christianisme, où l’on rencontrait les plus belles femmes de la Palestine, la population était en grande partie juive, car cette ville n’eut pas d’évêque. De même, Scythopolis (Bethsan), qui devint à cette époque la capitale de la deuxième Palestine (Palœstina secunda), et Néapolis (Sichem), devenue la capitale des Samaritains depuis que Samarie était une ville chrétienne, renfermaient de nombreux habitants juifs. Mais dans toutes ces villes, excepté à Nazareth, les Juifs étaient en minorité et étaient presque complètement perdus au milieu de la population chrétienne.

Mais si les Juifs de la Palestine et de l’empire byzantin étaient régis en tant que citoyens par une législation restrictive, du moins purent-ils, jusqu’au règne de Justinien, pratiquer librement leur religion. Cet empereur fut le premier qui, non content d’étendre leurs incapacités civiles, s’immisça dans leurs affaires religieuses. C’est lui qui promulgua la loi humiliante en vertu de laquelle ils ne pouvaient pas témoigner en justice contre les chrétiens (532). Il est vrai qu’il leur laissa le droit de témoigner entre eux, tandis qu’il refusa toute force au témoignage des Samaritains, même contre leurs coreligionnaires, et leur interdit de disposer de leurs biens par testament. Justinien se montrait si sévère envers les Samaritains, parce qu’ils s’étaient révoltés à plusieurs reprises contre le pouvoir impérial et s’étaient donné autrefois un roi,