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tion du Conseil. Sa sévérité contre les opposants paraît lui avoir encore inspiré une autre décision. Il défendit, en effet, l’accès de l’école à toute personne dont la pureté de sentiments et d’intentions n’était pas connue, et il plaça à l’entrée de la salle un gardien chargé d’en éloigner tous les suspects. Il est à supposer que Gamaliel voulait atteindre par cette mesure ceux qui n’étaient poussés à l’étude de la Loi que par des raisons peu élevées, et qui venaient écouter les docteurs par vanité ou par intérêt. Deux sentences, l’une de Johanan ben Zakkaï et l’autre de Zadok, paraissent confirmer cette supposition. Le premier dit en effet : « Ne t’enorgueillis pas de la science que tu as acquise, tu n’as été créé que pour étudier. » — « Ne te sers pas de la science, dit Zadok, comme d’une couronne pour t’en parer, ni comme d’un outil pour en tirer profit. » Gamaliel s’efforçait de bannir de l’école tout sentiment bas et mesquin et d’en écarter les contradicteurs irascibles et querelleurs, et peut-être aussi les délateurs.

Les deux mesures que le Nassi avait prises pour imposer à tous les décisions doctrinales du patriarcat et tenir éloignées certaines personnes de l’école soulevèrent chez les docteurs une opposition qui ne se manifesta d’abord que fort timidement. L’arme dont se servait Gamaliel pour briser les résistances était l’excommunication, arme qu’il maniait avec l’énergie et l’implacable sévérité qu’inspire une ardente conviction. L’excommunication (Nidduï) n’avait pas encore à ce moment la sombre signification qu’elle eut plus tard ; elle consistait simplement à isoler sévèrement l’excommunié en défendant tout rapport et tout commerce avec lui jusqu’à ce qu’il se fût soumis repentant à l’autorité du Conseil. Tant que durait l’excommunication, qui était infligée au moins pour trente jours, le coupable devait être vêtu de noir et observer certaines pratiques de deuil, et s’il mourait pendant qu’il était excommunié sans avoir pu auparavant s’amender ou faire acte de soumission, le tribunal faisait déposer une pierre sur son cercueil. Gamaliel ne se laissait arrêter par aucune considération d’amitié ou de famille. Justicier inexorable, il ne craignait pas de se créer des ennemis acharnés en lançant l’excommunication contre les personnages les plus importants de son époque ; il excommunia