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Cette dernière ville, ancienne capitale de la Perse, comprenait, par suite de cette immigration forcée, une population juive si considérable qu’on lui donna le nom de Jehudia. En Babylonie, Schabur ne se montrait pas moins dur pour les Juifs, et Râba dut, sans doute, donner maintes fois de l’argent pour assurer sa sécurité et celle de ses coreligionnaires. Félicité par ses amis de la tranquillité dont il jouissait au milieu des épreuves qui affligeaient les autres Judéens, il leur répondit : « Vous ne savez pas tout ce que je suis obligé de faire en secret pour la cour du roi Schabur ! » Un jour, cependant, il courut un sérieux danger. Un juif ayant eu des relations avec une femme perse, il le fit flageller ; le condamné en mourut. Schabur en fut informé, et il ordonna de punir sévèrement Râba d’avoir fait appliquer, de son propre chef, une peine corporelle. Ce docteur paraît avoir échappé au châtiment par la fuite, mais sa maison fut mise au pillage. Cette affaire ne semble pas avoir eu d’autre suite pour Râba, grâce à l’intervention de la reine-mère Ifra-Ormuzd, qui aurait dit à son fils Schabur : « N’irrite pas les Juifs, tout ce qu’ils demandent à Dieu, il le leur accorde. » On sait déjà qu’Ifra ressentait une vive sympathie pour les Juifs, et particulièrement pour les docteurs, auxquels elle confiait parfois ses plus secrètes pensées, et qu’elle envoya au chef d’école Joseph une bourse pleine d’or, qu’il accepta, malgré l’opposition très vive de Rami. Ifra eut aussi la singulière idée d’envoyer un animal au chef de l’académie de Mahuza, avec ordre de l’offrir en sacrifice comme témoignage de sa vénération pour le Dieu-Un.

Râba mort, l’école de Mahuza perdit toute son importance, et l’académie de Pumbadita reprit son ancien rang. Mais une sorte de lassitude s’empara dès ce moment de cette école, sa sève parut épuisée. Aucun des successeurs de Râba ne fut en état de le remplacer. Nahman ben Isaac, Papa et Hama de Nehardéa, chefs des écoles babyloniennes, purent bien maintenir pendant quelque temps les traditions de fine analyse et de dialectique pénétrante de l’académie de Pumbadita, mais ils furent incapables de former quelque élève remarquable.

Nahman ben Isaac (né vers 280, mort en 356) dut sa nomination comme chef d’école à son âge avancé, à sa profonde piété, et