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paru accorder à ses compatriotes, il leur permit de s’allier à des bâtards. Les Mahuzéens lui en ayant exprimé leur mécontentement, il les apaisa par ces mots : « Je ne fais qu’étendre vos droits, je vous laisse libres de vous unir à des familles sacerdotales ou à des bâtards. »

Râba avait encore un autre défaut, il aimait beaucoup l’argent. Un prosélyte de Mahuza, nommé Issor, lui avait confié une somme de 12 000 zuz (7 500 francs) pour la remettre, après sa mort, à son fils. Quand Issor tomba malade, Râba espéra pouvoir garder le dépôt qui lui avait été confié, parce que, d’après la loi juive, les enfants d’un prosélyte nés avant sa conversion n’avaient pas le droit d’hériter de leur père. Un autre docteur, informé du chagrin qu’éprouvait Issor de ne pouvoir laisser par testament ses biens à son fils, lui suggéra l’idée de déclarer devant témoins que toute sa fortune appartenait à ce fils. Râba en voulut à son collègue du conseil qu’il avait donné à Issor, comme s’il lui avait fait perdre une fortune sur laquelle il avait des droits légitimes. Et cependant, une loi talmudique, tout en admettant que, d’après la légalité stricte, on n’est pas tenu de rendre aux enfants prosélytes un dépôt confié par leur père païen, condamne toutefois comme ayant agi contre l’équité et la morale tout homme qui garderait un pareil dépôt. Râba donna une autre preuve de sa cupidité en exigeant de ses métayers un fermage plus élevé que celui qu’on payait d’habitude en Babylonie. Sa conduite envers les indigents était parfois absolument contraire aux prescriptions de la loi écrite et de la tradition qui enseignent la douceur, la commisération et la charité. Son frère Saurien était encore plus dur que Râba. S’érigeant en censeur des mœurs, il châtiait les pauvres dont la piété ne lui paraissait pas suffisamment rigoureuse en leur imposant de durs travaux, comme à des esclaves, et en les obligeant à le porter dans sa litière dorée. Non seulement Râba ne blâma pas ces actes arbitraires, il les justifia même en déclarant qu’ils étaient conformes à une ancienne loi qui permet de traiter en esclaves les Juifs qui n’observent pas les prescriptions religieuses.

Il faut dire que la simplicité et l’austérité des mœurs d’autrefois avaient fait place, chez un grand nombre de Juifs babyloniens, à la vanité, à l’orgueil et à l’amour du luxe. Certains docteurs de la