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ils auraient prévu qu’en faisant appel au bras séculier de la puissance romaine, ils se donnaient un maître et exposaient le christianisme à un très grave danger. L’empereur Constance pouvait dire à bon droit : « Que ma volonté soit la loi de l’Église et tienne lieu de religion. » Sous son règne, les questions religieuses étaient résolues en dernier ressort, non par les docteurs de l’Église, mais par les eunuques et les dames de la cour. Aussi bien, un esprit de sombre fanatisme animait tous les chrétiens, depuis l’empereur jusqu’au plus infime de ses sujets, au point que de simples querelles de mots amenaient quelquefois des persécutions sanglantes. Les Judéens eurent naturellement à souffrir de cette intolérance ; dès le commencement du régner de Constance, plusieurs de leurs docteurs furent exilés, entre autres, Dimé et Isaac ben Joseph. Plus tard, la situation des Judéens devint encore plus douloureuse, les docteurs furent sans cesse menacés de mort ; il se produisit alors parmi eux un mouvement important d’émigration. Parmi les émigrés, on remarquait Abin et Samuel bar Juda (337-338). Peu à peu, l’école de Tibériade fut complètement délaissée, et toute activité intellectuelle cessa parmi les Judéens de la Palestine. Jusqu’alors, il y avait encore une espèce de synhédrin qui délibérait sur les questions importantes ; cette institution disparut à son tour. Les derniers membres connus de cette assemblée furent Haggaï, Jona et Josi. Les sentiments malveillants de l’empereur Constance envers les Judéens se firent jour par un certain nombre de mesures très rigoureuses qu’il édicta contre eux. Il leur fut interdit, sous peine de mort (339), de se marier avec des femmes chrétiennes, de circoncire un esclave (339), et même de convertir des esclaves païens. Ces mesures restrictives étaient illégales, car les Judéens étaient citoyens romains et, comme tels, ne devaient être soumis à aucune loi d’exception. Mais qu’importait le droit et la justice à cet empereur faible et déloyal, dominé complètement par quelques eunuques et quelques prélats de cour, et qui soumettait l’Église elle-même à ses caprices ! Constance ou ses courtisans ecclésiastiques furent, en réalité, les fondateurs de l’État chrétien.

Au commencement de son règne, Constance soutint de nombreux