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l’étude, ne crois pas que tes collègues doivent te suivre et que ta présence leur soit indispensable, ne te fie pas trop à ta sagesse. » Éléazar, dont l’avenir paraissait si brillant, tomba dans l’oubli, ses condisciples devinrent les héritiers de la parole du maître et leur science éclaira les générations suivantes d’un rayon lumineux. Les plus illustres de ces docteurs étaient : Gamaliel, Josua et Éliézer. Comme chef de cette école sur laquelle reposaient alors les espérances des Judéens de tous les pays, on nomma Gamaliel.

Ce docteur était un descendant de Hillel, et ses aïeux s’étaient succédé pendant quatre générations à la tête du Synhédrin. Il a fallu sans doute triompher de nombreuses difficultés avant que le fils de celui qui avait participé à la révolte contre Rome pût être nommé à une telle dignité. Gamaliel prit comme ses aïeux le titre de Nassi (patriarche). Son élévation au patriarcat avait été favorisée par Agrippa et Bérénice, elle dut avoir lieu sous le règne de Titus (79-81), à l’époque où cet empereur jouait le rôle de bienfaiteur du peuple et se faisait appeler « les délices du genre humain, » lorsque Bérénice espérait encore devenir impératrice romaine. Ce fut à cette même époque que les lieutenants romains de la Judée remplacèrent probablement par un gouvernement sage et modéré le régime d’arrogance et de cruauté qu’ils avaient imposé jusque-là aux Judéens. Il semble aussi qu’à ce moment quelques fugitifs suspects s’étaient rassemblés en Judée, car on vit reparaître des disciples de Schammaï.

Gamaliel choisit pour résidence la ville de Jabné. Cette ville occupait alors le premier rang comme siège de l’enseignement juif, mais au dehors et tout près d’elle s’étaient fondées de nouvelles écoles. Éliézer enseignait à Lydda, Josua à Bekiin, plaine qui s’étend entre Jabné et Lydda. D’autres disciples de Johanan étaient entourés de groupes d’élèves qui leur donnaient le titre de Rabbi (maître). Pour le distinguer des autres docteurs, on donna à Gamaliel le titre de Rabban (le maître général). Ainsi l’étude de la Loi, loin d’avoir souffert de la mort du fondateur de l’école de Jabné, se développa au contraire et acquit encore une plus grande importance ; mais le lien qui unissait toutes les écoles menaçait de se rompre. Les discussions des disciples de Schammaï et de Hillel, qui avaient dégénéré souvent, avant la destruction du tem-