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lopperdans ses conférences. Le pouvoir judiciaire appartenait aux exilarques. Ceux-ci, soit parce qu’ils n’étaient pas versés dans les questions juridiques, soit parce qu’ils n’avaient pas ou ne voulaient pas prendre le temps de rendre la justice, en confiaient le soin aux docteurs. Ces derniers rendaient la justice devant la maison ou le palais de l’exilarque ; de là, le nom de Juge de la porte (dayyan di baba) que portait le chef de la magistrature.

Huna garda pendant quarante ans la direction de sa metibta. Le respect que ses contemporains professaient pour son savoir et son caractère lui permit de rendre la Babylonie complètement indépendante de la Judée, et de faire reconnaître aux écoles babyloniennes une autorité religieuse égale à celle des écoles de la Palestine. Il rompit le dernier lien qui rattachait les pays de l’exil à la mère patrie, ou plutôt il eut le courage de faire envisager la situation sous son vrai jour. En réalité, la Babylonie était déjà, depuis de nombreuses années, égale et même supérieure à la Palestine, et c’est par respect pour le berceau du judaïsme, ou pour obtenir en faveur de quelque doctrine la sanction des écoles d’un autre pays, que les savants babyloniens consultaient quelquefois l’opinion des docteurs de la Judée. Sous la direction de Huna, l’académie de Sora occupait le premier rang en Babylonie. Ce docteur mourut subitement à l’âge de quatre-vingts ans (297). Ses amis et ses élèves rendirent à ses restes les plus grands honneurs. L’orateur qui prononça son oraison funèbre commença par ces mots : « Huna méritait que l’esprit saint reposât sur lui. » Son corps fut transporté en Palestine ; là, les hommes les plus remarquables, tels que Ami et Assi, allèrent au-devant du convoi. Il fut enterré dans le caveau de son compatriote Hiyya.

Un des plus jeunes contemporains de Huna était Juda ben Yehesquêl (220-299). Ce docteur, doué d’une intelligence pénétrante, avait un caractère ferme et loyal, mais très anguleux. Descendant d’une famille dont l’origine remontait peut-être jusqu’aux temps bibliques, il attachait une importance capitale à la noblesse et à la pureté de race. Il aimait la simplicité en toute chose, et il se montrait violent et blessant envers ceux qui étaient raffinés dans leurs manières ou leurs paroles. Quoique sa vénération pour la Terre sainte fût profonde, il blâmait vivement ceux