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innocence, les plus graves prescriptions alimentaires. Il y eut cependant des exilarques qui eurent une connaissance très approfondie de la Loi, possédèrent les plus solides vertus et furent comptés parmi les gloires les plus pures du judaïsme. L’importance numérique des Judéens de Babylonie, l’indépendance dont ils jouissaient dans ce pays, le pouvoir presque absolu de l’exilarque, imprimèrent à l’histoire juive de cette région un cachet tout particulier. Il se créa en Babylonie une situation nouvelle que la Judée n’avait pas connue, qui nécessita l’établissement de nouvelles lois et poussa la doctrine religieuse vers une nouvelle évolution.

Sous le patriarcat de Juda Ier les jeunes gens de Babylonie affluaient en nombre considérable dans les écoles de la Galilée. On aurait dit qu’ils se hâtaient de se réchauffer, dans la patrie juive, avant son extinction complète, à la flamme expirante du foyer de l’enseignement religieux, afin de pouvoir répandre ensuite la chaleur vivifiante de l’étude de la Loi dans le pays où ils étaient nés. La jeunesse juive des pays parthes était entraînée par une attraction irrésistible vers la Palestine ; c’était là un témoignage de l’amour profond que les Judéens dispersés ressentaient pour le pays de leurs aïeux. Beaucoup de ceux qui ne pouvaient pas se rendre en Palestine s’y faisaient porter après leur mort, pour y dormir du dernier sommeil. On voyait arriver, chargés sur de petites barques ou transportés à dos de chameau, de longues rangées de petits cercueils contenant les ossements de ceux que la pensée seule de reposer un jour dans la Terre sainte avait soutenus et consolés à l’heure suprême. Quelques-uns de ces cercueils, provenant d’Alexandrie et de Syrie, ont été retrouvés ; ils portent à l’extérieur, à côté du nom du défunt, de très beaux ornements. Ce désir passionné d’être enseveli dans le pays des ancêtres était encore augmenté par la croyance que la résurrection des morts aura lieu en Palestine. Les chrétiens eux-mêmes partageaient cette espérance, ou, pour mieux dire, cette superstition. Mais si les morts de la Babylonie, enterrés en Palestine, ne se sont pas réveillés de leur sommeil, les jeunes gens babyloniens qui venaient s’asseoir aux pieds du patriarche Juda Ier s’imprégnaient en quelque sorte de la Terre sainte et en revenaient animés d’une