Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/172

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

manière de vivre particulières, il avait même ses poids et ses mesures spéciaux. Dans cette région, quatre villes surtout avaient une importance capitale et occupèrent successivement le premier rang. C’était d’abord Nehardea, forteresse construite près de l’Euphrate et du canal Naraga, et habitée exclusivement par des Judéens ; elle protégeait la Babylonie juive. Pendant quelque temps, Nehardea fut la Jérusalem de la Babylonie ; au moment où le temple subsistait encore, cette ville centralisait les dons offerts pour le service du temple par toutes les communautés babyloniennes, et, de là, les sommes recueillies étaient envoyées, sous bonne escorte, à Jérusalem.

À quelques milles de Nehardea, au sud, était située la ville de Firuz-Schabur (plus tard, Anbar), fortifiée et très populeuse, la plus importante cité après la capitale, Ctésiphon. Non loin de là, près d’un des nombreux canaux de l’Euphrate, se trouvait la ville de Pumbadita, où s’élevaient de superbes palais. Elle était également habitée exclusivement par des juifs, qui y étaient établis depuis de longs siècles ; les Judéens de la Babylonie la considéraient comme leur capitale. Autour d’elle et dans son voisinage étaient plusieurs petites villes et quelques châteaux forts. Les gens de Pumbadita passaient pour être ingénieux et retors ; on les disait même rusés et voleurs. « Si tu te trouves avec un habitant de Pumbadita, dit un proverbe, change d’hôtel. » Au sud de Pumbadita, à 124 kilomètres (22 parasanges) de là, était Mata-Mehassia, qui était bâtie près d’un immense lac, Sora. Ce lac n’était autre que l’Euphrate, qui se développait dans cette région profonde sur une très large étendue. Mata-Mehassia s’appelait aussi Sora, du nom de ce lac ; sa population était composée de païens et de Judéens. La campagne qui entourait Sora était très fertile ; tous les ans, les nombreux canaux et les embranchements de l’Euphrate l’inondaient et la fertilisaient. Cette ville formait un contraste absolu avec Pumbadita ; tandis que celle-ci se distinguait par la magnificence de ses édifices et le caractère sournois de ses habitants, les gens de Sora, au contraire, étaient pauvres, modestes et honnêtes. « Il vaut mieux, disait un proverbe, demeurer sur un fumier à Mehassia que dans un palais à Pumbadita. » À ces trois villes, Nehardea, Pumbadita et Mata--