Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/164

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en entourer le bord d’une guirlande de roses, et la placer entre le soleil et l’ombre, l’éblouissant éclat qu’elle jetterait alors représenterait le rayonnement de la figure de ce docteur. » Mais il était d’une beauté un peu efféminée, il n’avait pas de barbe. Ses cils étaient très longs et projetaient leur ombre sur le visage. Ne possédant pour tout bien qu’un petit champ, il s’associa avec un de ses condisciples, Ilpha, et s’occupa de commerce. Bientôt après, il abandonna les affaires et se voua entièrement à l’étude ; il vendit son champ. Quand ses ressources furent épuisées, le patriarche Juda pourvut à son entretien.

Johanan devint un précieux collaborateur de Juda II ; il fut le plus fécond amora de son temps. Grâce à ses nombreux disciples, l’ensemble des opinions qu’il a émises forme une des parties capitales du Talmud. Il ne se contentait pas, comme Hanina, de faire pénétrer la Mischna dans la mémoire de ses élèves, il soumettait le texte à une analyse rigoureuse, examinait chaque assertion avec une sévère attention et comparait entre elles les opinions divergentes ; il fut ainsi amené à déclarer que les décisions de la Mischna n’avaient pas toujours force de loi. Tibériade, avec son doux climat, ses champs fertiles et ses sources thermales, devint le siège de l’école de Johanan. Des disciples nombreux ne cessaient d’affluer de tous côtés vers cette ville ; il en venait même de Babylone, où enseignaient cependant les plus illustres maîtres. Il y eut plus de cent Amoraïm qui adoptèrent et enseignèrent les décisions de Johanan. Ce docteur s’était lié d’une étroite amitié avec le patriarche, et il l’appuya vigoureusement dans les tentatives qu’il fit pour modifier certains usages. Du reste, les décisions de Johanan étaient, en général, moins sévères que celles de l’école de Babylone, qui fut organisée à son époque. Il abolit la défense d’apprendre le grec ; il pensait que la connaissance de la langue grecque était pour les hommes une sauvegarde contre les délateurs, et une parure pour les femmes. Il appréciait beaucoup la civilisation grecque et lui donnait rang à côté du judaïsme. « En récompense de la bonne œuvre que les deux fils de Noé, Sem et Japhet, ont accomplie en couvrant la nudité de leur père, Sem (personnification du judaïsme) a pu s’envelopper du manteau orné de franges (Talit), et Japhet