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extrême violence ; tous les quartiers de la ville étaient cruellement frappés, excepté la rue où demeurait Hanina. La communauté déclara que son chef était responsable de cette calamité, parce qu’il ne voulait pas opérer de miracle en sa faveur pour éloigner le fléau. Hanina leur répondit : « Du temps de Moïse, il n’y eut qu’un Zimri (homme aux mœurs dissolues) et la peste enleva 24 000 hommes ; parmi vous, on trouve un grand nombre de Zimris, et vous vous plaignez de ce fléau ! » Une autre fois, la Judée souffrant d’une grande sécheresse, Hanina ordonna des jeûnes et des prières publiques, mais la pluie ne tomba pas. Les gens de Sépphoris s’en prirent de nouveau à Hanina ; ils vantèrent devant lui la puissance de Josua ben Lévi, qui avait obtenu de la pluie pour le sud de la Judée. Le pays étant dévasté plus tard par une nouvelle sécheresse, Hanina fit venir Josua à Sépphoris ; il joignit ses prières à celles de son collègue, le ciel ne les exauça pas. Hanina mit cette circonstance à profit pour critiquer vivement les croyances superstitieuses de sa communauté : « Vous le voyez bien, dit-il, ce n’est pas Josua qui amène la pluie, et ce n’est pas Hanina qui l’empêche de tomber ; mais les habitants de Lydda sont pieux, ils s’humilient devant Dieu, et Dieu les favorise ; vous, au contraire, vous êtes obstinés, vous persistez dans votre impiété, et Dieu vous punit. » Hanina était d’une modestie et d’une abnégation remarquables. Dans sa vieillesse, il reconnaissait et constatait avec empressement le mérite et la gloire de ceux même qui l’avaient éclipsé. Il atteignit un âge très avancé, il fut contemporain de trois patriarches : de Juda Ier son maître, de son fils Gamaliel et de Juda II.

L’enseignement de Johanan bar Napaha (199-279) forme un vif contraste avec celui de Hanina. Johanan fut, dès son bas âge, orphelin de père et de mère. « Je dois remercier Dieu, disait-il souvent, d’avoir perdu mes parents de bonne heure ; je n’aurais jamais pu remplir envers eux mon devoir filial aussi strictement que l’ordonne la Loi. » Sa figure était remarquablement belle, à tel point que, pour en parler, le Talmud, d’ordinaire si sec, emprunte le style imagé de la poésie : « Pour se former une idée de la beauté de Johanan, dit-il, il faudrait prendre une coupe d’argent toute neuve, la remplir de graines de grenade,