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favori particulièrement aimé d’un empereur romain. Le hasard, aidé par les prétoriens, avait toujours eu une grande part dans l’élection des empereurs de Rome ; ce fut lui qui fit d’un jeune homme de Syrie, Alexandre Sévère (222-235), le maître du monde. Le nouvel empereur tint le judaïsme en très haute estime, et, par la considération qu’il témoigna aux adeptes de cette religion, il contribua grandement à les relever dans l’opinion publique. Dans ses appartements, on voyait, à côté des portraits d’Orphée et du Christ, le portrait d’Abraham. Il répétait souvent cette maxime généreuse, que Hillel avait formulée longtemps avant le Christ et proclamée comme la base même du judaïsme : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu’on te fasse ; » il la fit graver sur le palais impérial et les édifices publics, et il avait soin de la faire publier par un héraut toutes les fois qu’il était obligé de sévir contre un coupable. Il opposait souvent les mœurs honnêtes des Judéens et des chrétiens à la corruption des Romains, et il voulait que la nomination des plus hauts dignitaires romains se fît d’après les mêmes règles que l’ordination des fonctionnaires juifs et chrétiens. Le christianisme trouva en lui un juge très bienveillant, mais il témoigna une préférence marquée pour le judaïsme ; il autorisa les communautés juives à accueillir des prosélytes et il abolit la loi d’Adrien qui défendait aux Judéens, sous peine de mort, de se rendre à Jérusalem. Les gens d’Antioche et d’Alexandrie raillaient les sympathies d’Alexandre Sévère pour la religion juive ; ils lui donnèrent le surnom de chef de synagogue (archisynagogus) et de grand-prêtre. À cette époque, le patriarche Juda jouissait d’une autorité presque souveraine ; il avait obtenu de nouveau la prérogative d’infliger des pénalités corporelles, à condition cependant de ne pas les appliquer publiquement et d’en prévenir d’abord l’empereur. Pendant sa campagne en Perse (231-233), Alexandre Sévère se rendait fréquemment à Antioche, et c’est là qu’il paraît avoir fait la connaissance du patriarche. De nombreuses légendes se sont formées chez les Judéens au sujet de la profonde sympathie que l’empereur Sévère (Asvérus), fils d’Antonin — ou Antonin lui-même — témoigna pour le judaïsme et ses adeptes. Il faut faire naturellement, dans ces récits, la part de l’exagération ; il n’est pas moins vrai que plus d’un fait rap-