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aussi vigoureux de corps que ferme de caractère. Dans le pays des Parthes, près de l’Euphrate, Abba Areka, fondateur d’une école qui subsista pendant plus de sept siècles, et Mar-Samuel, qui était à la fois docteur de la Loi, astronome et médecin. Juda II formait, en quelque sorte, en Palestine, le centre vers lequel convergeaient toutes ces intelligences. Au temps de sa jeunesse, les pratiques religieuses étaient observées avec une telle rigueur que la famille du patriarche elle-même était sévèrement blâmée chaque fois qu’elle s’en écartait. Mais, avec l’aide de son frère Hillel, il parvint à alléger en partie cette lourde chaîne. Dès leur enfance, les deux frères avaient marqué leur prédilection pour la culture grecque et le costume du pays. Les docteurs, qui savaient que les enfants du patriarche seraient obligés plus tard d’entretenir des relations avec les autorités romaines, leur pardonnaient cette infraction aux lois juives ; mais le peuple se montrait moins indulgent pour les transgressions de ce genre. Ainsi, il arriva une fois que Juda et son frère Hillel sortirent le jour du sabbat avec des chaussures ornées de boucles en or, ce qui était alors considéré comme défendu ; ils en furent vivement critiqués, et comme ils n’osèrent pas déclarer que cet acte n’était pas contraire à la Loi, ils durent se déchausser et remettre leurs souliers à leurs esclaves. Une autre fois, ils se baignèrent ensemble à Kaboul, des passants, les voyant, leur dirent : « Chez nous, il n’est pas permis que deux frères se baignent ensemble. »

Quand Juda eut succédé à Gamaliel II (vers 225), il transporta le siège du patriarcat de Sepphoris à Tibériade. Cette ville acquit ainsi une importance considérable ; elle conserva sa prépondérance plus longtemps que les autres villes où avait résidé autrefois le Nassi, et auxquelles se rattachaient tant de souvenirs, et elle devint le refuge des anciennes traditions. Le sud de la Palestine, ou s’étaient déroulés les principaux événements de l’histoire juive, fut totalement éclipsé par la Galilée.

Juda II inspira, comme son grand-père, une grande vénération à ses contemporains, qui le désignaient simplement sous le titre de Rabbi ou Rabbenou ; mais, pas plus que son aïeul, il n’échappa à la critique, que, du reste, il supporta avec une grande douceur. C’est ce docteur que les documents juifs représentent comme le