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à sa fille, dit-il, c’est l’initier à l’immoralité. » Cette doctrine fut généralement adoptée ; elle eut les plus funestes conséquences. Les communautés juives s’imposaient de très grands sacrifices pour créer des écoles élémentaires et supérieures pour les garçons, tandis qu’elles refusaient systématiquement aux jeunes filles tout moyen de s’instruire.

À côté de l’étude de la Loi et de la rigoureuse observance des prescriptions religieuses, la Mischna place l’obéissance aux lois de la morale. « La probité, dit-elle, exige que nous soyons fidèles à notre parole, même si la stricte légalité ne nous y oblige point. » « Ceux qui s’acquittent de leurs dettes, dit-elle encore, dans l’année sabbatique, où légalement ils seraient dispensés de les payer, qui remettent aux héritiers d’un prosélyte ce qu’ils doivent au défunt, bien qu’ils ne soient point tenus de le faire, et, en général, qui exécutent toutes leurs promesses, ceux-là sont aimés des sages. » Elle permet de réciter les prières dans quelque langue que cela soit ; elle n’exige que la ferveur et le recueillement. Elle ordonne de remercier Dieu pour les épreuves qu’il nous envoie, aussi bien que pour le bonheur qu’il nous accorde. En général, la Mischna s’efforce d’associer l’âme à la pratique de la religion. « On n’a pas rempli véritablement son devoir religieux, dit-elle, en prêtant une oreille distraite aux sons du Schofar, qu’on est tenu d’écouter au Nouvel an, aux fêtes et pendant le jour de l’Expiation de l’année du jubilé ; il faut que ces sons réveillent en nous la piété et nous rapprochent de notre Créateur. Les Israélites, ajoute-t-elle, n’ont pas triomphé des Amalécites parce que Moïse a élevé les mains vers le ciel ; ils n’ont pas été guéris dans le désert des morsures des serpents parce qu’ils ont porté leurs regards vers le serpent d’airain, mais parce qu’ils ont élevé leur cœur vers l’Éternel. » La Mischna n’entre cependant pas bien avant dans cette voie, elle attache toujours une plus grande importance aux obligations imposées par les docteurs qu’aux devoirs prescrits par la conscience.

Un autre trait caractéristique de la Mischna est une tendance marquée à supposer et à réunir les cas les plus invraisemblables, pourvu qu’ils fussent possibles, et à indiquer les prescriptions qui pourraient leur être appliquées. Cette tendance eut, dans la