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succombèrent à cette influence. La croyance fondamentale à un Dieu unique, spirituel, parfait, avait jeté, il est vrai, d’assez fortes racines dans le cœur des Israélites pour ne pouvoir être entamée par la conception, même spiritualisée, de l’Ahoura-Mazda[11] des Perses. Les voyants israélites reconnurent sur-le-champ, avec leur merveilleuse intuition, l’erreur de la doctrine iranienne, qui introduit la discorde dans l’univers en mettant aux prises le dieu de la lumière et du bien avec un dieu des ténèbres et du mal, Angro-Mainyous (Ahriman). A cette conception de la divinité, ils avaient opposé leur propre certitude, à savoir que le Dieu d’Israël a créé la lumière et les ténèbres, le bien et le mal[12], que l’univers et l’humanité ne sont pas tiraillés et déchirés par deux puissances rivales, mais appelés à l’unité et à la paix. Les docteurs de l’époque des sôpherim ont voulu, semble-t-il, donner une formule efficace à cette croyance, en intercalant dans la prière du matin ces mots : Dieu est le créateur de la lumière et des ténèbres, l’auteur de l’harmonie et le producteur de l’univers. — Pourtant, tout en voulant conserver intacte la conception judaïque de la divinité, ils n’en ont pas moins, à leur propre insu, laissé entrer dans le judaïsme certaines idées ou coutumes de la religion perse, ou du moins n’ont pas mis assez d’énergie à les en écarter. Ils crurent glorifier la divinité en lui donnant, à l’exemple des Iraniens, des myriades de serviteurs dociles, prompts à exécuter la volonté de leur maître. Les messagers de Dieu, qui dans les écrits bibliques ne sont autres que des envoyés ayant mission d’accomplir ses ordres, devinrent quelque chose comme les Amescha-Spentas et les Yazatas de la religion persane, c’est-à-dire des êtres célestes ayant un caractère propre et une personnalité bien accusée. On se représenta le trône de Dieu comme environné d’une milice innombrable d’anges, attentifs à son moindre signe et empressés à y obéir : Mille milliers le servent, et des myriades de myriades se tiennent à ses ordres. Comme chez les Perses, les anges s’appelèrent les saints Veilleurs (Irin kadischin). On leur donna