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enchérisseur. Et de fait, pourquoi non ? N’avait-il pas fécondé cette terre avec du sang ? D’ailleurs cette vente était une bonne affaire, et Vespasien était encore plus amoureux d’argent que d’honneurs. Mais comme le conquérant romain paraît petit à côté du conquérant chaldéen, Nabuchodonosor ! Quant au doux Titus, quelle fut sa conduite lorsque, après avoir fait immoler ou vendre comme esclaves des myriades de créatures humaines, on lui amena enchaînés les plus robustes jeunes gens de la Judée ? Il tint sa cour à Césarée et donna à ses amis des fêtes sanglantes, dans le goût romain. Des bêtes féroces étaient amenées dans un cirque et les prisonniers judéens forcés de se battre avec elles jusqu’à ce que, vaincus, ils fussent mis en pièces. Parfois le spectacle changeait : les prisonniers devaient lutter les uns contre les autres et s’entretuer. C’est ainsi que périrent 2.500 nobles jeunes gens à l’occasion de la fête anniversaire de son frère, l’ignoble Domitien (24 octobre). De là, Titus se rendit à Césarée de Philippe, au pied du mont Hermon, où résidait le roi Agrippa et où il organisa de nouveaux combats de bêtes fauves et de prisonniers. Là encore, de nombreuses victimes expirèrent sous les yeux de Titus et de Bérénice. A Béryte, au jour natal de son père (17 novembre), Titus déploya la plus grande prodigalité, et ce furent encore des Judéens qui rougirent de leur sang le sable de l’arène. Dans toutes les villes de Syrie, Titus procura à la haine païenne le réjouissant spectacle du martyre des Judéens. Telle était la douceur et telle la philanthropie du grand empereur !

Il s’en fallut de peu que tous les Judéens de l’empire romain, surtout ceux de la Syrie, de l’Asie Mineure, d’Alexandrie et de Rome ne subissent le sort de leurs frères palestiniens. A la suite de la guerre judéo-romaine, la population païenne était ulcérée contre les fils de Jacob ; sa haine allait jusqu’à la fureur, et elle ne cachait pas que l’extermination de cette race était le plus ardent de ses vœux. Était-ce l’œuvre du hasard ou de la Providence, toujours est-il que l’image de Bérénice vivait au cœur de Titus et lui inspirait la clémence envers ses coreligionnaires. A cette époque douloureuse de son histoire, la nation trouva en elle une protectrice.

Lorsque Titus approcha d’Antioche, toute la population se