Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/357

Cette page n’a pas encore été corrigée

la Judée résidait, non dans la personnalité d’un procurateur, mais dans le système de tutelle et d’exploitation qui pesait sur le pays, dans l’antipathie absolue entre les gouvernants et les gouvernés, entre l’élément étranger et l’élément indigène. Les meilleurs procurateurs, avec la plus ferme volonté de maintenir l’ordre et la légalité, n’auraient pu éviter de blesser la susceptibilité de la nation et de provoquer des froissements continuels.

Malgré la violence de ses griefs contre les Romains, la masse était encore indécise, ou du moins ne s’était pas encore portée aux résolutions extrêmes : aussi chacun des deux partis cherchait-il à la gagner à sa cause. Les amis de la paix se donnaient toutes les peines imaginables pour calmer le ressentiment populaire et pour présenter, d’autre part, au gouverneur de Syrie, Cestius, la résistance du peuple contre Florus sous un jour favorable, en mettant les récents désordres sur le compte du procurateur. Ils se hâtèrent d’informer Cestius de ce qui s’était passé, en le priant de venir à Jérusalem pour constater les déprédations causées par Florus, et se convaincre par lui-même des dispositions inoffensives du peuple. Cestius, trop nonchalant pour se livrer à une enquête personnelle, envoya à sa place Néapolitanus, un de ses capitaines. Cependant, les chefs du parti révolutionnaire avaient si bien travaillé le peuple, qu’il s’était décidé à refuser le paiement de l’impôt. Par contre, le roi Agrippa, qui avait de bonnes raisons pour appuyer le parti de la paix, convoqua le peuple afin de l’éclairer sur les dangers auxquels il s’exposait. Du haut d’une galerie (le Xyste) située en face du temple, il harangua la foule, ayant à ses côtés la princesse Bérénice, qui avait intercédé si chaleureusement pour les victimes de Florus et qui prêtait au roi judéen l’appui de sa popularité.

Dans son discours, Agrippa énuméra toutes les raisons bonnes on mauvaises qu’on pouvait invoquer contre la guerre. Ses paroles firent une impression profonde sur la plupart des auditeurs. Ils s’écrièrent qu’ils ne nourrissaient aucune haine contre les Romains, et qu’ils voulaient seulement être débarrassés de Florus. Si vos dispositions sont véritablement pacifiques, répliqua le roi, restaurez les galeries que vous avez abattues et payez à l’empereur les impôts arriérés. Un instant on put croire que l’ancien ordre