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Galiléen. Toutefois, au début, ces bandes ne connaissaient aucune discipline ; elles couraient par tout le pays sans but arrêté, prêtant leur bras à qui les payait ou à qui leur fournissait l’occasion d’assouvir leur soif de vengeance. Les jours de grande fête, ces hommes se glissaient au milieu de la foule rassemblée dans les galeries du temple et perçaient de leurs poignards ceux qui étaient désignés à leurs coups. Ils y mettaient tant de promptitude et d’adresse que la main qui frappait échappait aux regards et restait longtemps inconnue. Ces coups mystérieux jetèrent une profonde terreur dans les esprits. Les meurtres, du reste, étaient si fréquents que les docteurs de la Loi, de concert avec Johanan ben Zakkaï, durent abolir le cérémonial expiatoire usité en pareil cas : les prêtres n’auraient pu suffire aux sacrifices. C’est sans doute à cette époque que le grand Sanhédrin, désespéré de ces progrès croissants de la violence et des mauvaises mœurs, crut devoir résigner ses fonctions. Il transféra son siège de la salle du temple dans les hanouyoth (bazars) situées prés de Béthanie, hors de Jérusalem.

Dans ce désarroi toujours grandissant, les sages, qui se tenaient à l’écart des agitations de la foule, se serrèrent avec plus d’ardeur que jamais autour des saintes doctrines : sauvegarder l’héritage intellectuel du judaïsme, tel était pour eux le devoir suprême. Parmi eux se distinguait surtout R. Johanan ben Zakkaï qui, autant et plus encore que Siméon ben Gamaliel, président du Sanhédrin, était le coryphée des docteurs de son temps. Ses vastes connaissances et l’élévation de son caractère l’avaient désigné pour la vice-présidence du Sanhédrin. C’est en cette qualité qu’il supprima les dispositions légales que les circonstances avaient rendues inapplicables. Mais son principal objectif, la tâche qu’il prit surtout à cœur, fut l’enseignement de la Loi. Assis à l’ombre des murs du temple et entouré de ses disciples, il leur transmettait les traditions religieuses et l’interprétation de l’Écriture sainte.

Aux maux causés par l’anarchie vint s’enjoindre un autre qui, bien qu’innocent dans son principe, augmenta encore les misères et le deuil. Plus la situation allait s’aggravant, plus l’attente du Sauveur et du Pacificateur promis agitait le cœur des croyants.