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immense, qui lui servit à gagner des protecteurs afin de pouvoir impunément exercer des violences et braver les lois.

Depuis que la dignité de grand prêtre avait été prostituée par Hérode au point de devenir le prix de la vénalité et de la bassesse, il y eut des familles qui acquirent en quelque sorte des droits à ces fonctions : telles furent les familles de Boéthos, de Kanthéras (Kathras), de Phiabi, de Kamith, et d’Anan ; rarement le grand prêtre était choisi en dehors de ces familles. C’était entre leurs membres, une rivalité d’abjection et d’égoïsme ; plus d’une fois même ces compétitions jalouses se traduisirent par des voies de fait, et les rues de Jérusalem furent témoins de rixes ignobles. Chaque grand prêtre élu cherchait à tirer de sa charge le plus grand profit possible en nommant ses parents et ses amis à des emplois lucratifs, qu’ils en fussent dignes ou non. Leur impudence allait si loin, qu’ils envoyaient dans les granges leurs esclaves armés de gourdins pour s’emparer des dîmes, bien que chaque Israélite eût le droit de les distribuer à volonté. Il en résultait que les prêtres qui n’avaient pas la chance d’être apparentés au grand pontife étaient frustrés de leurs moyens d’existence et tombaient dans une affreuse misère. Depuis cette époque, disait-on, les signes de la faveur divine ont cessé d’apparaître dans le temple. Un pieux Pharisien, indigné de la turpitude de ces familles sacerdotales, prononça un jour cette apostrophe virulente : Malheur à la maison de Boéthos, avec ses massues ! malheur à la maison d’Anan, avec ses sifflements de vipères ! malheur à la maison de Kathras, avec ses fautes de plume ! malheur à la maison de Phiabi, avec ses coups de poing ! Ils sont grands prêtres ; leurs fils sont trésoriers, leurs gendres porte-clefs du temple, et leurs esclaves frappent le peuple à coups de bâton…

Cette dépravation des familles princières et pontificales gagna, comme une lèpre, les couches voisines et y produisit des abus monstrueux, dont une plume contemporaine nous a laissé la sombre peinture. Depuis que la justice criminelle s’exerçait au nom de l’empereur et sous la surveillance des procurateurs; la magistrature était tombée sous la dépendance absolue des Romains et des personnages influents : L’égoïsme, la vénalité, les tâches complaisances, les délations perfides, augmentent de plus en plus.