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Messie et d’une doctrine de salut étaient de purs non-sens. Les Grecs eux mêmes, auxquels il s’était adressé, devaient avoir entendu parler d’Israël et de Jérusalem ; autrement, ils ne l’auraient pas compris. Aussi ne put-il rien tenter que dans les villes où il y avait des communautés judaïques, par qui les païens avaient pu être quelque peu initiés à l’origine et aux doctrines du judaïsme.

Mais Paul cherchait précisément à rompre les liens qui rattachaient encore la doctrine du Christ au judaïsme. Gêné par la Loi, dont l’observance rendait plus difficile l’admission de prosélytes païens, il essaya de la déconsidérer, affecta de n’y voir qu’un obstacle à la sainteté et à la vertu parfaite. Non seulement les lois cérémonielles, mais, même les lois morales du judaïsme étaient, à son dire, autant d’empêchements à la voie du salut. Sans la Loi, les hommes n’auraient pas connu les mauvais désirs ; la convoitise ne s’est éveillée que parce que la Loi a dit : Tu ne convoiteras pas. C’est grâce à la Loi seulement que le péché a été connu. L’homme est un être charnel, enclin au péché, car la chair est faible et résiste à la Loi. Aussi Paul oppose-t-il à la Loi une nouvelle doctrine : L’homme, dit-il, est devenu charnel, faible et pécheur, parce que le premier homme a péché. La faute d’Adam a enfanté un péché héréditaire et ineffaçable ; elle a condamné l’humanité à la mort. Or, ce péché, inné à l’homme, la Loi est impuissante à le vaincre. Pour triompher du péché et de la mort, Dieu a dû recourir à une combinaison spéciale : il a livré à la mort le Messie, son propre fils, et ensuite l’a ressuscité ; et celui-ci est devenu un second Adam, qui a effacé le péché originel, vaincu la mort et assuré l’immortalité. Jésus ou le Christ a affranchi, non pas Israël du joug des nations, mais l’homme de la puissance du péché.

Paul fit ainsi du christianisme l’antithèse absolue du judaïsme, donnant pour base à celui-ci la loi et la contrainte, à celui-là la liberté et la grâce. C’est Jésus, c’est le christianisme, qui a amené l’ère du salut prédite par les prophètes. Les vieilles choses sont passées, et toutes choses sont devenues nouvelles. L’ancien Testament (alliance) doit faire place au nouveau. Abraham lui-même n’a pas été justifié par les œuvres, mais par la foi : c’est ainsi que Paul accommodait, par des interprétations subtiles, les textes de